François Médéline vient de publier chez 10/18 son deuxième polar historique sur les séquelles de la guerre de 40. On y retrouve le rythme imposé au lecteur par Ellroy pour son cycle californien. Mais il y a aussi du lamento façon Pagan chez Médéline. Dans "L'Ange rouge", la variation sur Schneider, le héros tragique de Pagan, s'appelle Alain Dubak. Il est borgne et commande un "pack de six", dirait Oppel, six flics entre Saône et Rhône pour élucider une affaire de meurtre hors du commun. La scène de crime est un chef d'œuvre gothique, une chapelle vaudou embarquée sur un radeau en flammes abandonné au gré du courant de la Saône, un corps ligoté à une croix.
"Mamy", une femme flic, colmate les failles existentielles de son chef de groupe. Avant d'être grosse, elle a été championne de France des Super Welters. Sa spécialité: "La frappe au sternum, en direct du droit. Elle termine toujours ses cibles à moitié asphyxiées avec les pieds, pour ne pas s'abimer les mains." On est en 1998 et Lyon est bien une ville de roman noir.
Le règne d'Edouard Herriot dont le radicalisme peinard a pu laisser penser qu'on allait ronronner dans la tiédeur provinciale jusqu'à la fin des temps s'est soldé en 1957. Et quand le roman de François Médéline commence, même si Raymond Barre trône à l'Hôtel de ville, rien de sa rondeur n'inspire l'écrivain qui va nous plonger dans une apocalypse criminelle.
"Y a-t-il un rapport avec le Christ? (…) C'est un serial killer? Les journalistes se sont excités. Ils tenaient l'affaire du siècle."
Ellroy en point de mire, Lyon comme boussole, et le beaujolais comme affluent.
L'Ange rouge - François Médéline - Points - 480 pages - 8,50 €
Lionel Germain
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