Sous le saint patronage – laïc ! – de Georges Darien et de son Voleur et aussi du "Voleur de Talan" [sic] du poète Pierre Reverdy, François Darnaudet nous livre une de ces novellas prestement troussées dont il a le secret, mêlant réalité et fiction, ou autofiction, pour le plaisir du lecteur et bien sûr aussi de l’auteur.
"Le Voleur" de Georges Darien (1862-1921) est le roman le plus célèbre de cet anar de cœur qui passa trente mois à Biribi et dénonça dans un autre livre ce bataillon disciplinaire devenu depuis tristement célèbre. Son roman est une subtile autofiction qui tourne comme chez Darnaudet autour d’œuvres volées et d’identités usurpées;
Louis Malle en avait donné une adaptation au cinéma en 1967 avec Jean-Paul Belmondo.
L’inspiration du livre de Pierre Reverdy (1889-1960), poète méconnu ami de Picasso et de Braque, semble au premier abord fort éloignée de ce que nous raconte Darnaudet. Mais il ne lui emprunte pas que son titre, qu’il détourne: on a pu dire de Reverdy qu’il avait publié avec son "Voleur de Talan" une autobiographie cubiste; c’est ce que fait Darnaudet avec son voleur de bandes dessinées, décomposant puis recomposant son autobiographie qui débute par la fiction d’un manuscrit trouvé dans un vide-grenier.
Ce vrai-faux polar livre des détails qui ne trompent pas le lecteur s’il connait un peu l’auteur. C’est bien Darnaudet qui écrit et nous emmène images à l’appui (le bouquin est richement illustré) dans ce voyage à travers le temps perdu retrouvé de la contre-culture graphique des années folles 70 à 90, où l’on se prendrait presque à chantonner, sur l’air de "Ex fan des sixties" (de Gainsbourg et Birkin), "Disparus Alexis, Vaughn Bode, Jean Boullet, Idem Frédéric Fajardie, Loro, Jacques Lob, Éric Losfeld… "
Le Voleur de talents - François Darnaudet - La Mouette de Minerve - 114 pages - 11,90€ - ***
François Rahier