Sam Glockenspiel a beau faire du gras dans son bureau désert de détective privé californien, garder l'espoir de retrouver Molly et écouter "Calamity jazz" de Vernon Sullivan à la radio, il feint encore de croire au voyage qui vous mène du Royaume de la Nuit à la délivrance des Lumières.
Dans un roman noir, la lumière est verte comme un océan de dollars, 100 000 exactement, le prix payé par une Milady spectrale pour dénicher une clé dans la doublure d'un veston porté par un cadavre six pieds sous terre. Oui, c'est compliqué pour Sam. Son toubib se suicide pour l'inciter à vivre encore. Vernon mise un dollar sur le retour de Molly.
"Je suis un roman noir, comme
dirait l'autre" et l'univers de Sam est peuplé de héros dont les
copyrights courent encore, Mongo le nain, Milo, Dortmunder. Des pointures du
polar dont les patrons ont éteint la lumière justement.
Incardona
joue avec les canons du genre. Il restitue une partition volontairement
bancale, comme un standard désaccordé. Et c'est là bien-sûr qu'on découvre la
ruse initiale, celle d'une promesse de bonheur délirante. En partant du royaume
de la nuit, on échoue fatalement sur une terre brumeuse. "Les vrais durs
n'y dansent pas, mais creusent", sans illusion sur le sens de l'effort. La
clé de cette affaire ouvre la chambre froide où ne git que la dépouille d'une
littérature essorée.
Misty – Joseph Incardona – Baleine – 185 pages – 16€ - **
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche – 7 avril 2013
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