En vacances à Andernos, le commissaire Mallock oublie la fièvre parisienne et essaie d'atténuer le souvenir de Thomas, son fils mort cinq ans plus tôt dans des circonstances qui restent mystérieuses. Bien-sûr, un flic de roman en vacances, ça finit toujours par trébucher sur l'affaire du siècle. En l'occurrence, on assassine un propriétaire de grand cru, sa femme est accusée, et sa belle mère est candidate à la présidence de la République. Ami de la famille, le flic local échappe au conflit d'intérêt en faisant appel au commissaire bourru.
La victime et sa femme représentent deux familles alliées dans la production d'un vin dont l'origine remonte au quatorzième siècle quand le vicomte Pancrace d'Armuth planta du merlot pour les Anglais et du morillon pour son grand cru. Au passage, le morillon est un cépage proche du pinot qu'on retrouve dans le champagne. Ce qui autorise le mauvais jeu de mots du titre de cet article puisqu'en 1323, le vicomte Pancrace d'Armuth va fournir son vin au pape Jean XXII, successeur de Clément V.
L'histoire compliquée resserre peu à peu les liens entre cette famille décomposée et la malédiction séculaire qui pèse sur le domaine, mêlant l'affaire des templiers, la découverte d'un étrange charnier, l'hérédité incertaine des uns et des autres et même le rappel d'un meurtre en chambre close que Mallock et sa tribu devront élucider.
Malgré les apparences, les détours volontaires de la fiction et les attentes parfois du lecteur, le malheur n'a jamais de racines extrahumaines. A la fin de l'histoire "frissonnante", Mallock a beau avoir flirté avec le fantastique en allant puiser dans ses rêves opiacés un surplus de conscience, les ressorts de la tragédie nous renvoient à la grisaille de l'âme humaine: cupidité et réflexe prédateur constituent le fond de sauce à laquelle les ogres du roman accommodent leurs proies. Comme on le dirait d'un vin, bourru mais distingué, Mallock.
Les larmes de Pancrace – Mallock – Fleuve noir – 463 pages – 19,90€ - **
Réédition remaniée Fleuve noir février 2016 - 512 pages - 14,90€ -
Réédition remaniée Fleuve noir février 2016 - 512 pages - 14,90€ -
Lionel Germain