Nouvelliste fécond, Marcus Malte a prouvé qu'il savait tenir la longueur en produisant des romans comme "Garden of Love", onze fois primé dont une fois par les lecteurs de Quai du Polar en 2008. Dans un format plus anglo-saxon, à mi-chemin entre la nouvelle et le roman, "Fannie et Freddie" est une "novella" de 90 pages à laquelle l'éditeur a ajouté une réédition d'un texte paru en 2005.
Avec son héroïne armée d'une fureur secrète, on quitte Bayonne dans le New-Jersey pour un parking de Wall Street dans lequel elle neutralise violemment un homme, apparemment un inconnu, qu'elle glisse dans le coffre de sa voiture avant de reprendre la route. Une histoire américaine. L'histoire banale de l'Empire, avec ses noms de villes biblique comme Bethlehem, "Christmas City" baignée des néons de la fête de Noël et dont quelques flocons nous rappellent que l'exil est aussi une affaire de littérature.
Il suffit de franchir la rivière pour aborder le désenchantement du rêve américain au cœur d'un quartier d'hiver où une maison sur deux est à vendre. Elle s'appelle Fannie et son père à elle travaillait à la Bethlehem Steel d'où dégueulait l'acier du Golden Gate. Il s'appelle Freddie et travaille pour une banque. On devine dès l'ouverture qu'ils ne sont pas vraiment faits pour s'entendre. Entre les forbans cousus d'or et les soutiers condamnés à mourir à crédit, la folie et le désespoir ont bien choisi leur camp.
Fannie et Freddie – Marcus Malte – Zulma – 160 pages – 15,50€ - ***
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche – 19 octobre 2014