L'Espagne
a connu l'hiver avant nous dans cette première moitié du vingtième siècle et sa
saison froide a duré beaucoup plus longtemps que la nôtre. Le roman de Victor
del Arbol nous ramène à cette paix armée trompeuse imposée par la dictature.
Deux
femmes au cœur de la tourmente symbolisent la difficulté de solder l'héritage
franquiste. La première, Isabel, a trompé son mari pour un espion du régime.
Elle est arrêtée en 1941, au moment où elle fuyait au Portugal avec son fils de
dix ans, Andres, le petit samouraï amoureux de sa maman. La seconde, Maria, est
en 1976 une avocate contrainte de se séparer de Lorenzo, un mari violent membre
des services de sécurité.
Alors que la dictature a basculé, un nouveau coup
d'état se trame dans les premiers mois de 1981 et Lorenzo confie à son ex-femme
un dossier d'où s'échappent de manière très concertée les mauvais génies du
drame espagnol.
Si
les femmes transmettent la vie, la mort moissonne avec entrain. Victor del
Arbol construit des personnages dont la vérité reste intacte malgré le poids
écrasant de l'Histoire. D'ailleurs, d'où vient-elle cette tristesse du
samouraï? Empruntée à la double personnalité d'un guerrier japonais du XVIIème
siècle qui avait peur de la mort et se prêta pourtant au rituel d'un suicide
douloureux, elle accompagne la détermination du vengeur comme un symptôme
d'enfance trahie.
La tristesse du Samouraï –
Victor del Arbol – Traduit de l'espagnol par Claude Bleton – Babel noir – 475
pages – 8,70€
Lionel
Germain – Sud-Ouest-dimanche – 26 mai 2013
Cinquième
titre sélectionné pour le Prix Polar Lire en poche Gradignan – Sud-Ouest 2013.
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