Nos années vingt nous rapprochent de celles du siècle dernier. À ceux qui espéraient une insouciance tranquille sous la lumière artificielle de la société d'abondance, la jeune génération du roman noir répond en s'inscrivant dans la lignée sombre et parfois dépressive des pionniers américains.
Thomas Sands appartient à cette mouvance d'auteurs qui naviguent du polar apocalyptique à l'exploration des zones d'ombre de notre histoire. Son écriture d'une puissance descriptive impressionnante est ici au service d'un personnage de flic embarqué dans la noirceur opaque d'une scène de crime, une jeune fille assassinée. Ce qu'on a mille fois lu nous bouleverse encore par la grâce du regard de cet enquêteur, fils abimé à jamais par la violence muette d'un père arabe.
Le mépris de soi du vieil Algérien le pousse à refuser sa langue, à l'interdire à son propre fils, et comme ces feux de tourbe, à nous rappeler que la haine peut ressurgir quelques années après les brûlures de la guerre.
Thomas Sands perfuse son récit d'une colère héritée de la douleur et du silence. Premier joyau noir de cette rentrée.
Je suis le fils de ma peine – Thomas Sands – Les Arènes Equinox - 304 pages – 19€ - ***
Lionel Germain
Lionel Germain
Lire aussi dans Sud-Ouest
version papier