L’hiver finit d’un coup à Portland, Maine, cette année-là, l’eau de fonte dégouline des toits encore chargés de neige, l’humidité vient à bout des dernières congères, et Charlie Parker, le privé tourmenté que l’on surnomme "Bird", comme son homonyme le jazzman, traque les criminels en poursuivant un dialogue intime avec ses fantômes.
Un cadavre vieux de plusieurs années vient d’être découvert enterré dans les bois, l’autopsie montre que c’est celui d’une jeune femme qui venait d’accoucher, l’enfant, qui pourrait avoir cinq ans, reste introuvable. Des réseaux semi-clandestins d’aide aux femmes victimes de violence à l’homme qui poursuivait la jeune mère et voulait s’en prendre à son enfant, Parker découvre que quelqu’un d’autre recherche l’ogre, ou l’enfant – à cause d’un mystérieux livre à la découverte duquel l’un et l’autre sont mêlés, un grimoire menant dans les arcanes de l’Enfer.
Deux réprouvés, un avocat démoniaque flanqué d’une assistante sadique rompue aux crimes les plus atroces, agissent dans l’ombre et finissent par croiser le chemin de Parker. C’est le mal à l’état pur auquel se trouve alors confronté le détective, comme dans les polars de Georges Bernanos ou les romans horrifiques de Clive Barker. Parker reconnait tout de suite l’Adversaire et l’intrigue va se situer maintenant sur un autre plan, le thriller bascule dans le surnaturel.
La vie déjà pleine de morts, son épouse et l’une de ses filles en particulier, quand il se promène le soir le long des chenaux qui sillonnent les marais au large de Portland, "la lumière sur l’eau, et le son distant de la mer, comme un murmure au bord du monde", semblent l’inviter à entamer le Long Voyage. Mais il revient toujours, à la douleur, aux amis, aux combats à mener pour sauver le monde des flammes.
La jeune femme et l’ogre - John Connolly - Traduit de l’anglais (Irlande) par Laurent Philibert-Caillat - Les Presses de la Cité - 552 pages - 22€ - ***
François Rahier
François Rahier
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