On parle de littérature d'évasion et l'échappée belle se fait parfois sur un détail narratif apparemment sans importance, un décor familier dans lequel on acclimate l'impossible étrangeté d'y vivre un drame comme celui de Clara, l'héroïne de Luc Bossi et Isabelle Polin. Transformer le périmètre quotidien entre le Grand-Théâtre de Bordeaux et la Place de la Victoire en territoire hostile.
Mais Clara, étudiante en histoire de l'art a rencontré, François, son beau neurologue devant une toile de Hals, "L'Homme à la main sur le cœur", achetée par la ville de Bordeaux et visible au musée des Beaux-arts. C'est le deuxième détail qui nous met le frisson du roman à portée de regard.
L'homme à la main sur le coeur- Hals (1632) Musée des Bx-Arts de Bordeaux Cliché L.Gauthier |
Le modèle au visage fier inspire confiance avec son demi-sourire bienveillant et cette main aux articulations légèrement tourmentées qui semble accorder au spectateur une compassion sincère.
Ces embardées paresseuses dans les marges de l'intrigue ne sont pas moins innocentes que la belle maison de François, isolée en pleine campagne. Deux meurtres ont été commis entre Chartres et Bordeaux. Et c'est de la bouche de son charmant fiancé que Clara apprend qu'elle n'est pas celle qu'elle croit être. On joue au chat et à la souris avec le mystérieux Lycaon, l'homme-loup qui a trouvé Clara. Peut-on manipuler la mémoire comme un programme informatique? Tout semble prévisible mais les scénaristes nous noient dans le regard clair du portrait de Hals.
Trouvée – Luc Bossi et Isabelle Polin – Fayard – 276 pages – 18€
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche – 13 juillet 2014