"Mon père m'a appris à lire et à écrire à la maison. Depuis ce jour-là, je lis tout ce qui me tombe sous la main. Je n'ai pas de frères et sœurs, mes copains sont débiles, ma mère est cinglée."
Voilà ce qu'Alper Kamu, gamin stambouliote de cinq ans, confie pour justifier sa précocité. Le jeune détective en herbe cherche à éclaircir les raisons pour lesquelles son nouvel ami s'accuse de la mort de son frère. Et puis plus important, il aimerait interpréter correctement le chagrin de son père et comprendre les liens amoureux et secrets d'un oncle récemment décédé.
Alper a du temps pour écumer les rues de son quartier malgré la vigilance de sa nurse de 16 ans dont il est amoureux. Mais qu'est-ce que l'amour? En dehors de ses escapades déductives au service du commissaire, le meilleur d'Alper Kamu trahit son intelligence du monde et la qualité de son questionnement. Si sa mère maudit sa belle sœur de lui avoir fait rencontrer "un sosie de Paul Newman" qui allait devenir son "mécréant" de père, c'est que l'amour est un contrat truqué.
Dans le monde d'Alper Kamu, les belles sœurs, les mères, les femmes en général, ont une aura menaçante. Qu'on ne s'y trompe pas, les scènes burlesques ne sont que des mouvements de surface. Alper n'est pas un adulte en culotte courte. Les larmes et la morve dissimulent une vraie colère contre la trahison et le désamour.
Une fleur en enfer – Alper Canigüz – Traduit du turc par Alessandro Pannuti – Mirobole Éditions – 256 pages – 20€ - **
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche – 5 juillet 2015