Pour qu'un roman vous arrache au monde, il lui faut posséder cette énergie mystérieuse qui aspire l'âme du lecteur, la téléporte dans un univers dont les contours lui deviennent bientôt aussi familiers que ceux du monde qu'il abandonne. Dans le roman de Hari Kunzru, les larmes sont blanches mais la mélodie est noire comme le premier blues échappé d'un champ de coton.
C'est cette frontière entre les couleurs qu'on traverse avec le narrateur épris d'une musique étrangère à sa peau si pâle. Écoute le refrain fredonné par le "maître" blanc sur son cheval devant l'abreuvoir: "Un nègre meurt j'en prends un autre, une mule meurt je dois en racheter une autre". Blanc est la couleur du deuil, noir la couleur de l'espoir.
Larmes blanches – Hari Kunzru – Traduit de l'anglais par Marie-Hélène Dumas – JC Lattès – 372 pages – 21,50€ - ****
Lionel Germain