Pete Killharney est un chroniqueur d'un genre un peu particulier. Depuis un bar irlandais minable voisin de la huitième Avenue, il tient une sorte de tribunal dont les assesseurs sont une poignée de trognes rougeaudes. Parmi ces justes qui trinquent à leur univers menacé, Pete Killharney dresse une liste noire sur laquelle figurent les crapules reconnues de New-York. Une dizaine de notables protégés par la loi même si personne n'a d'illusion sur leur moralité. On trouve là pêle-mêle un évangéliste Télé, un délégué à l'ONU, un industriel ou un banquier. Mais le gag tourne au drame quand un zélateur inconnu commence à appliquer des sentences de mort et que la liste noire rétrécit comme peau de chagrin.
Le héros, ancien joueur de basket, est défini comme "un chroniqueur renommé, lauréat du prix Pulitzer, buveur notoire et conscience de la ville". À l'origine de sa vocation de justicier, il y a un drame personnel. L'accident dont son père fut victime au volant du bus qu'il pilotait, et le comportement de la municipalité qui abandonna la veuve et les orphelins en décrétant de façon mensongère que l'employé était un ivrogne.
Le roman noir américain classique tourne toujours autour de la bouteille. Même quand le père n'a rien bu, les enfants trinquent.
Liste noire – Timothy Downey – série noire Gallimard n° 2121 (1987) - ***
Lionel Germain