Si le quiproquo constitue le carburant principal du théâtre de boulevard, "Révolution" de Sébastien Gendron s'apparente à du roman de boulevard. Sunset boulevard, sans doute, avec des quiproquos terriblement mortels qui réduisent le casting dès les deux premières pages.
Katzemberg, patron du Torpedo, une boite de nuit dont chaque employé est un sosie d'acteur célèbre, est incapable de gérer un agenda ou de se servir d'un ordinateur. Voilà pourquoi George Berchanko se retrouve à jouer les premiers rôles. Personnage sans envergure, au "teint de blette", il est propulsé dans le bureau de Katzemberg à la recherche d'un emploi d'informaticien et victime d'une erreur d'aiguillage fatale au patron du Torpedo.
Au côté de Pandora, une aventurière titulaire d'un bac G, George devient alors l'artisan d'une "révolution autoroutière" cadencée par une filmographie prestigieuse, de Lumet à Soderbergh en passant par le fameux cri de singe de Johhny Weismuller.
Roman de boulevard, donc, mais à la manière d'une illusion d'optique qui vous donnerait à voir le père Fouettard dans la défroque du Père Noël. Un peu comme les situationnistes feignant de s'interroger sur la capacité de la dialectique à "casser des briques". "Le monde est déjà filmé. Il s'agit maintenant de le transformer", disait Guy Debord. Le burlesque de Gendron convertit les éclats de rire en rafales cathartiques.
Révolution – Sébastien Gendron – Albin Michel – 396 pages – 19,90€ - ***
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche – 22 janvier 2017Lire aussi dans Sud-Ouest-dimanche