Sur le Spirit of Ulysse, on s'apprête à vivre une croisière mouvementée en compagnie de Joséphine, chanteuse préposée aux animations. Le paquebot crache son mazout de Barcelone à Cagliari et malgré un affichage publicitaire vantant ses prétentions écologiques, sa principale raison d'être clignote dans ses entrailles où les boutiques aimantent les cartes bleues avec une voracité sans limite. L'héroïne de Vincent Maillard, très critique sur l'entreprise, en a quand même profité pour inviter sa famille à un tarif de basse saison réservé aux parents du personnel.
Mais si son père, sa mère et son jeune frère se retrouvent à bord, c'est aussi pour communier dans le souvenir de Baptiste, le frère aîné disparu en montagne. Chaque année, la tribu se reforme le 8 juillet pour évoquer l'accident d'escalade survenu dans les gorges de l'Ardèche. Ce moment d'émotion, Vincent Maillard le dépouille de tout pathos grâce à ce personnage survitaminé, borderline et plein d'humour.
"Jusqu'au collège, j'ai détesté mon prénom, ce truc de vioque dont mes parents m'ont affublée en mémoire d'une tante – bonjour l'audace. Ensuite, avec la chanson de Bashung, je me suis réconciliée avec lui et, lui et moi, on a commencé à se mettre d'accord pour dire: je m'appelle Joséphine et je vous emmerde."
Un soir, un homme a le malheur de draguer Joséphine alors qu'il est avec une autre femme. Et cette autre femme se suicide un peu après en passant par-dessus le bastingage. L'enquête écarte la possibilité d'un meurtre mais elle renvoie Joséphine à un questionnement sur l'identité de cette passagère.
Toute la magie du polar se concentre autour des raisons qu'elle pouvait avoir de rencontrer Joséphine, autour du vol en spirale du milan royal, d'une grand-mère obstinée, de la chute de Baptiste sur les falaises ardéchoises, et de ce qu'on devine sans pouvoir le comprendre avant les dernières pages. Osez Joséphine.
La spirale du milan royal – Vincent Maillard – Philippe Rey – 304 pages – 21€ - ***
Lionel Germain