Ouvrir un Varesi, c'est s'exposer au parfum des sous-bois, à une certaine idée du bonheur inséparable de la maturation des choses et d'une longueur en bouche de la littérature. Auteur de onze romans dont celui-ci est le troisième publié par la petite maison bordelaise de Nadège Agullo, on l'a comparé à Simenon pour la qualité de ses atmosphères. Et c'est vrai encore ici où le commissaire Soneri ne fuit les brumes de Parme que pour mieux se dissoudre dans le brouillard du petit village de son enfance, perdu au cœur de la vallée des Appenins.
Une cinquantaine de pages après cette ouverture bucolique, les derniers souffles de l'automne trahissent des promesses de bolets. Soneri, lui, n'a fait qu'étrenner des rumeurs. Le roi du jambon de pays s'est fait la malle et les hypothèses de comptoir s'emparent de cette disparition. Bien qu'en vacances, on sait que le commissaire finira par les convertir en "affaire" et se retrouvera donc à enquêter sur le passé trouble de Montelupo.
Valerio Varesi appartient à cette classe d'auteurs dont le "territoire" est un marqueur décisif sans qu'on puisse le réduire à un quelconque régionalisme. Comme chez Indridason en Finlande, il se caractérise par une gestion du temps indifférente au format du polar contemporain. L'ombre du titre est le voile derrière lequel se dessinent peu à peu les contours de cette histoire ancienne et tragique. Soneri y puise ses racines et le lecteur s'y abandonne avec bonheur.
Les ombres de Montelupo – Valerio Varesi – Traduit de l'italien par Sarah Amrani – Agullo – 320 pages – 21,50€ - ***
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche - 8 avril 2018Lire aussi dans Sud-Ouest