Après la Nouvelle Zélande, l'Afrique du Sud et l'Argentine, c'est en Colombie que Caryl Férey a posé son sac. Malgré l'accord conclu avec les FARC par Uribe, le jeu politique est toujours dominé par la "Violencia".
On la retrouve dans "Paz" sous la forme épurée d'une "tragédie familiale". Saul Bagader est le Procureur de la Fiscalia. Issu d'une famille d'éleveurs propriétaires terriens proche d'Uribe, il est en première ligne contre les "narcos" et a contribué à en finir avec le système des "faux positifs", trafic de primes distribuées aux miliciens fournisseurs de cadavres de guérilleros.
Associé à ce père tout puissant, Lautaro Bagader, à la tête d'une brigade d'élite de Bogota enquête sur une série de meurtres qui reproduisent les horreurs de la "Violencia". Seul rescapé d'une unité des Forces spéciales opposées au Front 26 des FARC, il est aussi en première ligne contre son propre frère, Angel, un ancien des FARC, libéré sous une identité d'emprunt après avoir été condamné tous les jours à un simulacre d'exécution.
Des femmes magnifiques, une jeune travailleuse sociale impliquée dans la réinsertion des miliciens démobilisés et une journaliste d'investigation, accompagnent le combat à distance des deux frères. Caryl Férey nourrit sans faiblesse plus de cinq cents pages d'une densité exceptionnelle et nous plonge jusqu'aux racines d'un des systèmes les plus inégalitaires au monde.
Paz – Caryl Férey – Série noire Gallimard – 536 pages – 22€ - ****
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche – 15 décembre 2019Lire aussi dans Sud-Ouest