Fin du 19ème siècle dans une province reculée de Suède. Le secrétaire de la Société d'économie rurale ajoute une annexe à son rapport annuel. On y fait état d'une rumeur concernant la disparition d'un riche commerçant dans un glissement de terrain. "Les populations retardées de ces régions sauvages ont une fâcheuse propension à préférer les ouï-dire à la réalité vraie."
On peut parler de roman noir ou de roman policier puisque dès le début on devine qu'un meurtre a été commis. Mais passée cette introduction, le registre change. Seule une voix tragique s'adresse au seigneur pour tenter de comprendre la malédiction qui frappe les pauvres. Le système de la propriété privée instaure une loi d'airain sur les objets et sur les corps. Pour le paysan sans fortune, la femme et la fille sont soumises au troc.
Cette longue prière interroge un Dieu absent et sans cesse invoqué pour légitimer le viol et la dépossession. Sombre chef d'œuvre.
Le chemin du serpent – Torgny Lindgren – Traduit du suédois par Elisabeth Backlund - Actes Sud – 142 pages – 16€ - ****
Lionel Germain