Comme
dans le célèbre roman de Marc Behm, Ayerdhal décrit la mutation du chasseur fasciné par sa proie. Une
mortelle randonnée à l'ère où l'œil électronique monstrueux braqué
sur la foule et capable d'isoler chacun de nous a remplacé l'image désuète du
"Private Eye".
Le
gibier de potence dont Stephen, jeune criminologue, flaire les traces pour
Interpol, est une jeune femme, Ann X, au CV criminel aussi impressionnant que
sa capacité à se fondre dans l'anonymat des mégalopoles, à ne jamais fournir
aux caméras de surveillance qu'un clone d'elle-même dont le souvenir s'efface
de la mémoire des témoins.
La
transparence est au cœur de la réflexion portée par cette intrigue envoutante.
A qui appartenons-nous dans une société capable de nous déposséder du moindre
espace intime? Les voleurs d'images ne sont pas des collectionneurs
inoffensifs. Un cartel d'officines gouvernementales cherche à s'emparer du
pouvoir apparent d'ubiquité de la jeune femme.
Et
au moment où des silhouettes anonymes ont réussi à prendre le contrôle d'avions
de ligne pour les précipiter sur les tours du World Trade Center, le livre se
referme sur cette interrogation: qu'en est-il de la puissance virale des
informations à partir desquelles s'organise notre perception du monde? Ayerdhal
pose des questions et on peut discuter les réponses qu'elles suggèrent
mais le débat reste passionnant.
Transparences – Ayerdhal –
Livre de poche – 605 pages – 7,50€ - ***
Lionel Germain
Ayerdhal sur le site de l'éditeur Au Diable Vauvert