De la disparition d'une jeune femme et de son bébé à La Teste-de-Buch un peu avant Noël à l'implication d'un père iranien introuvable, "Tabous" installe un théâtre d'ombres où s'animent des seconds couteaux d'une vérité quasi documentaire. Danielle Thiéry s'émancipe peu à peu de son personnage récurrent, la commissaire Edwige Marion.
Tandis que Marion retourne à Paris, c'est Alix, psychologue et nyctalope, qui se délocalise sur le bassin d'Arcachon pour affronter le mystère d'une famille resserrée autour d'un fardeau noir et douloureux. Victime de l'hostilité et des préjugés d'une corporation toujours machiste malgré la féminisation des effectifs, la jeune femme cultive sa propre ambiguïté envers l'institution policière. Les odeurs "de vieilles chaussettes et testostérone" des commissariats la répugnent et l'attirent.
Au rayon des seconds couteaux, un personnage de jeune homme en rupture, rebaptisé "Truc" par une mère indigne, innerve le scénario en alliant bouffonnerie et maladresse dans son parcours de petit délinquant emprunté à un fait divers et débordé par l'horreur de ses crimes. Il y a enfin la puissance obscure de cette forêt girondine où les derniers tabous concernant les rapports entre une mère et ses enfants sont mis à mal. Voilà un roman dont la tonalité évoque les "célébrations" paradoxales de l'Angleterre par Elizabeth George. Diablement efficace.
Tabous – Danielle Thiéry – Ombres Noires – 384 pages – 21€ - Réédition J'ai Lu - octobre 2017 - 416 pages - 8€ - ****
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche – 27 novembre 2016