Les lecteurs comprendront pourquoi au dernier chapitre, mais on n'a sans doute pas toutes les raisons habituelles de se réjouir des retrouvailles avec Frank Elder, le personnage que John Harvey a sorti de son sac de chagrin quand il pensait avoir épuisé les larmes de Charles Resnick, le flic de Nottingham.
Frank aussi était flic, il a même croisé Resnick une fois. Il a quitté la ville et la police pour l'extrême sud-ouest quand sa femme lui a préféré un homme riche. Leur fille Katherine a subi une séquestration suivie d'un viol à l'âge de seize ans. Aujourd'hui, c'est une jeune femme qui navigue à vue entre thérapie et séance de scarification.
Le jour où elle débarque chez son père, elle a les yeux rouges et les poignets bandés. Sa rencontre avec un peintre à la mode sado-maso n'est pas un bon pari sur l'avenir. On retrouve d'ailleurs l'artiste assassiné dans son atelier et la fille de Frank sur la liste des suspects.
Le roman de John Harvey ressemble à un blues chanté par Vicky, la compagne de Frank. La mélancolie poignante du récit porte l'obstination du père à sauver sa fille de cette malédiction qui la poursuit depuis son adolescence. Mais chez Harvey, on sait aussi qu'il y aura un prix à payer, dans un dernier couplet froid comme le marbre.
Le corps et l'âme – John Harvey – Traduit de l'anglais par Fabienne Duvigneau – Rivages noir – 284 pages – 21,50€ - ***
Lionel Germain
Lionel Germain