L'ancienne journaliste Fiona Barton avoue sur son site qu'une histoire "lui trottait dans la tête" depuis longtemps. Désormais retirée dans son petit coin de Dordogne, la voilà disponible pour réanimer à sa guise les silhouettes des faits divers.
On pourrait résumer "La Coupure" d'une formule: trois femmes et un couffin. De quoi donner un parfum de comédie à une affaire qui n'a rien d'amusant. Dans le couffin, il ne reste du bébé qu'un squelette retrouvé sur un chantier de la banlieue de Londres. Les trois femmes penchées sur ce berceau macabre ont chacune un bagage secret dont Fiona Barton ne délivre que des fragments chapitre après chapitre.
Angela, d'abord, est la mère d'une petite fille qu'on lui a dérobée à la maternité. Emma, ensuite, est une éditrice aux relations familiales compliquées. On la surprend paniquée par la découverte de ce corps et par les investigations de Kate, une reporter à l'affût du scoop dans un journal fragilisé. Kate est celle qui va démêler peu à peu les fils qui pourraient relier les deux autres à la disparition de l'enfant.
Mais c'est bien à la périphérie de ce mystère que Fiona Barton situe les enjeux du roman. Les trois femmes sont travaillées par des désaccords intimes qui les caractérisent. Quand Emma s'épuise dans une confrontation avec une mère enfant, Angela cherche des réponses aux questions que pose la plus terrible des absences. Kate est elle-même à la recherche d'une vérité professionnelle qui lui échappe.
À travers ce personnage, l'auteure développe un commentaire désabusé sur l'état de la presse en général et sur l'évolution du métier de journaliste. Sa tendresse pour les arpenteurs de bitume de Fleet Street, où se concentrait naguère le fleuron de la presse britannique, est nuancée par l'inquiétude.
La Coupure – Fiona Barton – Fleuve noir – 480 pages – 20,90€ - ***
Lionel Germain