Au début du XXe siècle, à Lyon, l’industrie de la soie vit ses derniers beaux jours, dans l’insouciance d’une époque qui s’étourdit des mirages du progrès en essayant d’oublier la guerre qui vient. À Saint-Genis-la-Vallée, au cœur du pays des mouliniers et des soyeux, le temps d’un printemps puis d’un été incertains, Marie Jardin, la "Sans-Corset", jeune veuve émancipée et intrépide, enquête à sa façon sur une succession de morts, accidentelles ou pas, qui ont récemment endeuillé une manufacture.
Sherlock Holmes en jupons, entre secrets et mensonges, faux semblants et rancœurs héritées d’un passé pas si lointain dont on avait oublié la violence, Marie comprend vite qu’on la manipule, mais éprouve aussi un malin plaisir à se jouer de ceux qui croient la tromper, les hommes surtout, entraînant dans son allant une kyrielle de femmes jeunes ou moins jeunes qui font de ce livre écrit par un vieil homme une ode à la féminité triomphante.
Auteur de science-fiction de réputation internationale venu ensuite au roman de région, Jeury rêvait, dans ses dernières années, d’un "polar 1900". Le manuscrit vient d’en être retrouvé par sa fille dans un fichier oublié de l’ordinateur de l’écrivain. Ce roman attachant nous immerge une nouvelle fois dans un espace et un temps chers à son cœur, les monts du lyonnais qui ont vu naître sa famille, un pays d’hommes et de femmes debout que l’auteur excelle à dépeindre dans leurs travaux et leurs jours, au gré d’une écriture sensuelle et lyrique tissée d’emprunts au parler local…
Les trois veuves - Michel Jeury - Préface de Dany Jeury - Robert Laffont - 414 pages - 21€ - ****
François Rahier – Sud-Ouest-dimanche – 25 juin 2017