"Le jour de la rentrée, les élèves de Lincoln High School recevaient leurs nouveaux manuels d'occasion récupérés auprès du lycée blanc de l'autre côté de la rue. Sachant où partaient leurs livres, les élèves blancs les avaient annotés à l'intention de leurs successeurs: "Va te pendre, le nègre! Tu pues. Va chier." Le mois de septembre était une découverte des épithètes en vogue chez la jeunesse blanche de Tallahassee."
On est en Floride dans les années soixante en compagnie d'un jeune garçon, Elwood Curtis, rêveur à la façon de Luther King, sur le point d'accéder au Graal universitaire. Les rêves ont cette particularité cruelle de vous abandonner aux premières lueurs du jour. Dans l'univers ségrégationniste, c'est plutôt un cauchemar qui accompagne heure par heure le versant noir du monde. Elwood devra troquer son accession à l'université contre un passage à la Nickel Academy, une sinistre maison de correction où on l'expédie après une erreur judiciaire.
Martin Luther King continue d'inspirer les enfants noirs de l'Amérique. Notamment dans ce sud, héritier d'un apartheid peu enclin à se soumettre à l'universalité des droits de l'Homme. Colson Whitehead, prix Pulitzer en 2017 pour "Underground Railroad", double la mise en 2020 avec ce "Nickel Boys", roman de colère et de combat.
Nickel Boys – Colson Whitehead – Traduit de l'américain par Charles Recoursé – Albin Michel – 260 pages – 19,90€ - **** –
Lionel Germain
Lionel Germain