"Brasier noir" est le premier tome d'une trilogie déjà publiée aux États-Unis et dont l'intrigue flirte avec les grandes thématiques chères aux écrivains du Sud: la culpabilité des pères, la violence raciale, la corruption politique et la perte de toute innocence pour les fils. C'est le cas de Penn Cage, personnage déjà rencontré dans d'autres romans de Greg Iles.
Ancien juriste, Maire de Natchez, il est le fils d'un docteur dont l'infirmière noire a été martyrisée par les extrémistes blancs dans les années soixante. Quand s'ouvre la partie contemporaine du roman, on bascule avec les héritiers de cette période où le Klan et les milices de même obédience faisaient griller les Noirs dans les faubourgs de Natchez. C'est désormais face à une accusation de meurtre du père que le fils engage son combat pour la vérité.
Toujours difficile de refaire l'histoire. Le rétroviseur a souvent des défaillances coupables, surtout quand l'actualité n'a pas fourni en temps utile les réponses aux questions aussi troublantes que celles posées par la mort de John Kennedy par exemple. Sans être le sujet du roman de Greg Iles, l'assassinat du président américain s'y inscrit pourtant en marge d'une analyse plus subversive sur la réalité des guerres menées par les États-Unis.
La Corée où le Vietnam masquent un blessure secrète, plus profonde et jamais refermée, une guerre civile dont les nordistes ne sont que les vainqueurs provisoires. "La guerre en elle-même faisait encore rage dans tout le pays, juste au-dessous de la surface étincelante du Rêve Américain (…) quiconque avait lu un peu d'histoire savait que les grandes civilisations s'effondraient toujours de l'intérieur." Une fresque passionnante.
Brasier noir – Greg Iles – Traduit de l'américain par Aurélie Tronchet – Actes Sud – 1056 pages – 28€ - ****
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche – 8 juillet 2018Lire aussi dans Sud-Ouest