jeudi 19 décembre 2024

La hotte est pleine

 
" - Le problème, Benjamin - si je peux vous appeler Benjamin -, c'est que la justice est aveugle, et que pour elle, y'a pas photo: on a deux cadavres, les bijoux retrouvés dans vos bagages, la petite Mercier qui disparaît brusquement alors qu'elle logeait chez vous... Si vous prenez moins de quinze ans, je me fais nonne. 
Elle a un truc avec la religion, elle."



N'oublie pas mon petit soulier - Gabriel Katz - Le Masque poche - 320 pages - 8€


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mercredi 18 décembre 2024

Anti-contes de Noël


Créée en 2008 par Maxime Chattam, Olivier Descosse, Henri Loevenbruck et Franck Tilliez – vite rejoints par une quinzaine d’autres auteurs, la Ligue de l’imaginaire se donne pour but de réhabiliter une littérature populaire un peu décriée en se plaçant sous le patronage d’Alexandre Dumas voire de Victor Hugo. 


À ce titre ils publient régulièrement des œuvres collectives. La toute dernière paraît pour Noël, dans le cadre d’un événement caritatif, la campagne "Soutenez le rire médecin", retenue pour son implication constante auprès des enfants. Depuis 1991 cette association fait intervenir en effet des comédiens-clowns professionnels dans les hôpitaux pour permettre aux enfants, à travers le rire, de mieux se battre contre la maladie et la douleur. Le livre est donc vendu au profit de cette association. 




Vingt-et-un textes inédits, autant ou presque de contes de Noël, ou d’anti-contes à vrai-dire, tant leur contenu recommande de ne pas les mettre en toutes les mains. Le recueil s’ouvre par une auto-parodie collective signée Agnès Abécassis dans laquelle les 21 auteurs de la Ligue se retrouvent dans une sorte d’escape-game horrifique, un huis-clos infernal gore à souhait à côté duquel celui de Sartre paraît un peu gnan-gnan. 

Le jeu continue dans une autre histoire où l’on propose au lecteur de retrouver tous les membres de la LDI présents dans le texte. Mais ce genre de quizz cède vite la place à ce qui est le meilleur du recueil: petits bijoux policiers ou fantastiques (Maxime Chattam, Sébastien Drouin), noirs de chez noir (Nicolas Lebel), récits d’épouvante (Olivier Descosse), plongées dans l’histoire médiévale (Mireille Calmel), l’ésotérisme (Éric Giacometti), le conte philosophique (Bernard Werber) ou encore le récit maritime à la manière de Joseph Conrad (Bernard Minier). 

Ces "contes de Noël" ne pouvaient pas faire l’impasse sur le Père Noël: on y apprend son histoire à travers la biographie revisitée de Thomas Nast, qui publia réellement le 1er janvier 1881 dans le Harper’s Weekly son célèbre portrait de "Santa Claus" (Olivier Bal), des journalistes viennent l’interviewer dans son refuge lapon à un moment où il pense diversifier son activité tant ses lutins peinent à satisfaire des enfants avides de jouets "faits de plastique et de matériaux qui pillent les ressources naturelles de la planète" (Olivier Norek); mais on le retrouve aussi sous les traits d’un ogre – ou pire. Les jouets ne sont pas oubliés, et Niko Tackian nous fait partager le point de vue d’un petit soldat en lego perdu d’angoisse dans un gigantesque arbre de Noël vacillant sous les coups d’un énorme chat et que remettent en place tant bien que mal ces gigantesques créatures que sont les enfants venus déballer leurs cadeaux. 

Histoires macabres, humour féroce, rires grinçants, c’est parfois une sorte de révérence du désespoir que font chacun à leur manière tous ces auteurs à la magie de Noël et à la nostalgie de l’enfance. Enfin, seuls parmi tous ses confrères David Khara ne propose pas un conte mais une belle méditation qu’accompagne en 2e page de couverture du livre la photographie d’un minuscule coin de l’espace réalisée avec ses compagnons de l’équipe d’astrophotographie amateurs Astro-Fleet, un amas d’étoiles contenu dans la constellation de la Licorne : "Il était une fois un sapin de Noël si grand que notre système solaire tout entier y tiendrait plusieurs fois et si lointain qu’il faudrait plusieurs générations pour s’y rendre... "

Le Pire des Noëls – par la Ligue de l’Imaginaire – Le Livre de poche, 283 pages, 7,90 € - *** 
François Rahier




Gras de Noël


"J'aime pas le foie gras. J'ai jamais aimé le foie gras. Ou alors il y a longtemps, quand ma mère en achetait pour Noël, en promo au Leclerc, sous vide, dans un torchon à carreaux 100% synthétique. C'est gras, le foie gras. Ça colle au palais, ça laisse une pellicule de graisse et une culpabilité terrible, comme si c'était moi qui la gavais, l'oie."

 
"Ce qui ne m'a pas empêché de tartiner des toasts toute la journée, parce que j'ai besoin de ce job, et qu'il y a pire. Comme le pauvre mec au rayon jouets qui étouffe dans son costume de Père Noël, ou la nana qui vend des huîtres à l'extérieur, dans le bon air des pots d'échappement, alors qu'il s'est remis à neiger. J'ai fait ça, moi aussi. J'ai tout fait. Et s'il faut choisir, j'aime autant déambuler avec mon plateau dans les allées du Monop, pour proposer mon foie gras industriel à des gens qui ne l'achèteront pas."

Dehors tu vas avoir froid - Gabriel Katz - Le Masque poche - 240 pages – 8,50€ - **


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mardi 17 décembre 2024

Mémoire ouvrière


Scénariste pour le cinéma et la télévision (on lui doit le scénario et la réalisation de "Bluebird", adapté du roman de Dannie M. Martin, "L'Homme de plonge"), Jérémie Guez est aussi un auteur de polars distingué à deux reprises, d'abord pour "Balancé dans les cordes" par le Prix du polar SNCF en 2013, et par celui du roman historique en 2014 pour "Le Dernier Tigre rouge".


Dans "L'équilibre des corps", les valeurs qui caractérisent cette évocation des années 70 nous semblent effacées des bases de données contemporaines. À une époque où l'incertitude et l'angoisse du lendemain justifient les bouquets de dystopies au rayon noir des librairies, l'auteur réinstalle le logiciel du bonheur ouvrier et évacue le parfum de désastre à la mode au détour d'un simple échange amoureux: "il crut sentir dans ses cheveux une odeur de cendre mouillée, celle d'un petit matin après la fin du monde".



L'histoire commence en banlieue parisienne. Une famille italienne se rassemble autour de la figure patriarcale de Marcelo, ouvrier couvreur marié à Cécilia et père de la petite Chiara. Quand Marcelo ramène un jour à la maison un jeune orphelin sans abri, la bonne humeur et l'entente familiale se fissurent en deux clans: les hommes d'un côté, les femmes de l'autre.

L'hostilité de la mère est dirigée contre ce fils qui n'est pas d'elle, et Chiara n'épargne pas non plus ce "frère" avec lequel elle va pourtant partager beaucoup de choses. Mais à travers cette affaire de famille, récit d'une transmission d'un savoir-faire et d'une culture identitaire, c'est le portrait d'une classe ouvrière sommée de choisir entre le désir de rupture et celui de pérenniser l'héritage. 

Si Marcelo disparait, le monde après lui sera moins généreux. En ouvrant l'armoire où reposent les souvenirs du siècle dernier, Jérémie Guez restaure avec talent l'idée que la puissance romanesque de ces valeurs est sans doute l'antidote aux dystopies qui nous accablent.

L'équilibre des corps - Jérémie Guez – Seuil – 330 pages – 21€ - ***  
Lionel Germain




Jobs à barbe

 "J'ai toujours eu des jobs à Noël plus pourris les uns que les autres. J'ai été Père Noël, démonstrateur, agitateur de clochettes pour l'Armée du Salut, distributeur de tracts pour un attrape-touristes à Pigalle. J'ai vécu de petits contrats, de pourboires, d'amour, d'eau fraiche mais - jamais aussi loin que je me souvienne – je n'avais passé une journée complète à la période des fêtes en caleçon, sous la couette, à enchaîner les épisodes sur Netflix."




Quand tu descendras du ciel - Gabriel Katz - Le Masque poche - 288 pages - 8€ - **


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lundi 16 décembre 2024

Enfants de Marie



Jurica Pavicic n'écrit pas des romans d'action, encore moins des "Whodunit". Ses portraits introspectifs installent un climat d'inquiétude autour d'une intrigue dont le lecteur a l'impression de posséder les clés avant de se soumettre aux personnages. Katja est une femme de ménage dont les prières à la "Mater Dolorosa" visent à éloigner la police de son fils Mario. Le corps d'une adolescente de 17 ans, fille d'un notable, a été découvert dans une usine désaffectée et les enquêteurs se rapprochent peu à peu du coupable.



Quand Katja joue la vie de son fils dans cette trahison de la logique policière, Ines, sa fille, risque la sienne dans des liaisons dangereuses, et Zvone, le flic, ne sait plus à quel saint vouer son désir de justice. Finalement, un innocent pourrait bien pâtir des bons offices de la "Mater Dolorosa". Scénario impeccable pour trois personnages en quête de hauteur.

Mater Dolorosa - Jurica Pavicic – Traduit du croate par Olivier Lannuzel – Agullo – 416 pages – 23,50€ - *** 
Lionel Germain




mercredi 11 décembre 2024

Posthumains, trop humains?


Publié d’abord sous forme digitale en Pologne puis en Grande-Bretagne, ce livre a inspiré deux séries Netflix, en Belgique et en Turquie, avant de paraître en France cet automne. Récompensé par de nombreux prix, dont le European Science-Fiction Award, l’auteur a été l’invité du Festival des Utopiales à Nantes du 30 octobre au 3 novembre. 

Jacek Dukaj, né en 1974, est considéré comme le plus populaire des auteurs de SF polonais et le successeur de Stanislaw Lem. Auteur de romans et d’essais, il a aussi traduit dans sa langue le livre de Joseph Conrad "Au cœur des ténèbres" (qui a inspiré "Apocalypse now" à Francis Ford Coppola). Juste retour des choses, Conrad, qui écrivait en anglais, était d’origine polonaise. 



"La Vieillesse de l’axolotl" commence aussi par une Apocalypse, même si le terme est souvent remplacé dans le livre par celui d’"Extermination". Une onde de radiation neutronique probablement issue d’une éruption solaire atypique, mortelle pour la matière organique, se déplace vers l’ouest, au fur et à mesure de la rotation de la Terre autour de son axe, couvrant toujours l’un des hémisphères du globe. 



Les survivants échappent à la catastrophe en fuyant à bord d’avions de ligne volant en permanence dans la zone où il fait nuit, ou bien à bord d’un sous-marin, et quelques-uns cherchent refuge, le temps d’un hiver, sur la calotte polaire. 

C’est le thème des deux séries Netflix: la série belge "Into the night", deux saisons de 6 épisodes chacune (2020), et la série turque qui lui fait suite "Yakamoz S-245", une saison de 7 épisodes mise en ligne depuis 2022. 

Les séries se présentent comme l’adaptation du roman de Dukaj, mais en fait mis à part le début du livre qui évoque directement la catastrophe avec l’alerte clignotant sur les écrans: "EXTERMINATION?! ONDE NEUTRONIQUE À VARSOVIE À 19 H 54", quelques notes éparses au fil des pages, et, de temps en temps, les histoires que se racontent les posthumains pour s’amuser car ils pensent que l’homme est une légende, le roman parle de tout autre chose. 

Il y a effectivement eu une catastrophe, mais toute vie organique ayant disparu de la surface de la Terre, celle-ci n’est maintenant peuplée que de robots et de méchas, qui sont souvent des humains dont la conscience a été digitalisée juste avant la catastrophe. Privés de leurs corps, ils continuent d’exister en se téléchargeant sur des robots industriels, des drones militaires, des sexbots ou autres avatars inspirés des mangas japonais. L’univers dans lequel se déploie le roman de Dukaj est beaucoup plus proche de celui des "Transformers" que des deux thrillers d’anticipation belge et turc que diffuse Netflix. 

Le renversement des vieilles oppositions entre la vie et la mort, le progrès et la stagnation, l’organique et le mécanique, l’exploration des mystères de l’âme humaine et l’éternelle solitude de l’individu, tout cela est abordé dans un environnement et par des personnages que nous avons l’habitude de voir évoluer plus familièrement dans l’univers des mangas destinés aux adolescents. 

Ce qui renforce le caractère étrange, déroutant de ce livre, avec sa composition graphique très particulière, le texte est imprimé sur les pages de droite, le verso est réservé à un dessin, un schéma, des ex-libris ou des emblèmes, ou la plupart du temps simplement la page est blanche, – un cahier central en couleurs étant réservé aux illustrations hors-texte de Marcin Panasiuk du studio Platige Image. 

Et l’axolotl dans tout ça? Cette bestiole, une salamandre néoténique qui conserve ses caractéristiques juvéniles en devenant adulte, est une sorte d’icône de la culture contemporaine, de Julio Cortázar à Bernard Werber, de "Pokémon" à "One Piece" ou au jeu "Minecraft", du rap à l’astrophysique, avec l’étoile HD 224693 récemment nommée "Axolotl" etc. En vrai l’axolotl ne devient jamais adulte, et donc ne peut pas vieillir. 

"Il nous fallut bien du talent pour être vieux sans être adulte", chantait Brel. Et les méchas de Dukaj, quand ils philosophent sur l’homme, se retrouvent presque avec René Daumal qui écrivait dans "La Grande beuverie" en 1966: 

"Outre l'homme, il existe un autre animal qui, dans les conditions naturelles, n'arrive jamais à l'état adulte et qui, pourtant, se reproduit régulièrement. Il s'est accommodé de son état embryonnaire et n'a pas plus que l'homme le désir d'en sortir. C'est la larve d'une espèce de salamandre que l'on trouve dans des mares et des étangs du Mexique et que nous nommons, d'après un mot du pays, axolotl".

La Vieillesse de l’axolotl – Jacek Dukaj – Traduit du polonais par Caroline Raszka-Dewez – Rivages/Imaginaire – 329 pages – 22,50 € - ***
François Rahier 



mardi 10 décembre 2024

Salaud suprême




C’est le genre de personnage dont on redoute d’avoir un jour à croiser le chemin. Romain Slocombe, dont l'œuvre littéraire a longtemps été inspirée par le Japon et ses fantaisies sexuelles, a fait de l’inspecteur Sadorski le pivot d’une série consacrée à la Guerre et plus précisément à la collaboration.  Salaud suprême, ce héros négatif a participé à toutes les turpitudes du régime de Vichy. Inspiré d’un personnage réel, on le retrouve dans deux trilogies qui couvrent la période 42 à 45.



Déportation, pillage des biens juifs, torture des résistants, Sadorski a tout fait. On assiste dans ce dernier épisode au renversement de l’Histoire et des postures quand les mouvements de résistances mènent la chasse aux collabos en octobre 1942. Au cœur de cette traque, Romain Slocombe nous propose la rencontre entre deux monstres, Petiot et Sadorski. Un dernier voyage au bout de l’horreur.

Sadorski chez le docteur Satan - Romain Slocombe – Robert Laffont La Bête noire – 506 pages – 21€ - ***  
Lionel Germain




Fin de partie


"C'est joli, l'Autriche, au mois d'avril. Les sommets encore enneigés, la douceur de la lumière, le vert tendre des pâturages, et celui plus sombre des forêts. Ce sont tes premières vraies montagnes, mais tu n'as pas l'occasion d'en apprécier la beauté. Tu sais maintenant que la fin de la guerre approche, et qu'il s'agit de ne pas manquer ta sortie. C'est joli, l'Autriche, au mois d'avril, quand on n'a pas l'Armée rouge à ses trousses."




Ces féroces soldats - Joël Egloff – Buchet-Chastel – 240 pages – 20,50€ - ***


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lundi 9 décembre 2024

Faux amis




Le flic de Malin Persson Giolito s'appelle Farid, et même si on est à Stockholm, c'est la commune misère européenne qu'on découvre dans ce roman. D'ailleurs Malin Persson Giolito, qui a de qui tenir puisqu'elle est la fille de Leif G. W. Persson, lui-même auteur de polars, est une Européenne pur jus, ancienne élève du Collège européen de Bruges et un temps employée de la Cour de justice des Communautés puis de la Commission à Bruxelles.
 


Les banlieues de Stockholm produisent des drames qu'on pourrait dupliquer entre Berlin, Amsterdam ou Marseille. Farid y est né dans ces banlieues, son parcours tient du "miracle" qu'on affectionne dans les reportages sur les lieux de relégation tellement le destin des jeunes semble assigné à la violence. Et comme à Marseille dans cette banlieue de Stockholm on meurt beaucoup au cours de fusillades. 

Mais le portrait de deux de ces jeunes gens nous ramène encore à l'universel. L'un et l'autre appartiennent à des clans sociaux que tout oppose. L'amitié la plus puissante peut-elle alors résister à la brutalité du monde? C'est cette question qui traverse le roman et nous cueille à l'épilogue avec une force bouleversante.

Délits mineurs - Malin Persson Giolito – Traduit du suédois par Laurence Mennerich – Pocket – 528 pages – 9€ - ***
Lionel Germain




mercredi 4 décembre 2024

Faire de la Lune un jardin


"Je m’occupe d’une ferme sur la Lune, au bord oriental de la mer des Îles". Le ton est donné. Et les citations de Karen Blixen, Colette ou Aminata Sow Fall émaillant le texte nous font vite comprendre qu’ici nous sommes loin d’une SF hard science que la précision du vocabulaire technique laisserait parfois augurer. Quand elle a fondé le collectif Zanzibar avec d’autres auteurs de SF, Catherine Dufour se proposait de désincarcérer le futur.
 


Féministe, très critique sur le rôle assigné aux femmes dans la SF, elle a travaillé aussi sur l’imaginaire de l’exploration lunaire. Son dernier livre est une quête empreinte de poésie: une Lune terraformée, des humains reclus dans des cavernes souterraines, un jardin extraordinaire cultivé sous serre par une humanoïde, un chat augmenté, une gamine surdouée, beaucoup de robots – et une question: quel est l’avantage d’être humain?




Les champs de la Lune - Catherine Dufour - Ailleurs et demain/Robert Laffont, 283 pages, 20,50 € - ***
François Rahier


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mardi 3 décembre 2024

Règlements de comptes à Oran


Le polar algérien est une denrée rare (au moins en version française) et Yasmina Khadra s'est émancipé des collections du mauvais genre après avoir abandonné les aventures du commissaire Brahim Llob. On sera donc ravi de découvrir pour la première fois traduit de l'arabe un nouvel auteur expatrié d'abord en Italie puis aux États-Unis où il est professeur à l'université de Yale. 



Amara Lakhous a publié pourtant déjà quatre romans chez Actes Sud mais traduits de l'italien. Il nous offre une série B sur les retombées du terrorisme dans un pays qui s'abrite derrière une Charte de 2005 pour empêcher toute critique du régime. Ce que Kamel Daoud transgresse avec une puissance lyrique, Amara Lakhous l'intègre à une intrigue mouvementée de règlements de comptes. Par le truchement d’un flic fatigué et de la cohorte des corrompus, le roman noir fait le job.



La Fertilité du Mal - Amara Lakhous – Traduit de l'arabe (Algérie) par Lofti Nia – Actes Sud actes noirs – 288 pages – 22,50€ - ***
Lionel Germain


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"Raconte pas ta vie"


"Serena évaluait généralement un texte selon trois critères. Le premier était le plaisir de lecture: quand l'écriture était fluide, elle assignait un point. Le deuxième concernait l'autrice ou l'auteur, qui selon elle devait disparaître du récit. Or elle voyait souvent passer d'ennuyeux romans autobiographiques ou autofictif. Comme disait son chef, « à moins que tu ne sois Hemingway, on se fiche de ta vie ». En même temps, Serena détestait les auteurs ayant une prétention intellectuelle, qui voulait donner des leçons de vie aux lecteurs ou catéchiser le monde. Son troisième critère d'évaluation était le plus important de tous. Serena détestait les fins fermées: comme après un bon repas, elle voulait rester sur sa faim."




L'éducation des papillons - Donato Carrisi – Traduit de l'italien par Anaïs Bouteille-Bokobza – Calmann-Lévy noir – 495 pages – 22,90€ - ***


Sur le site de l'éditeur



lundi 2 décembre 2024

Hellfighters de Verdun




Jean-Marc Souvira a été flic pendant 25 ans ce qui donne du nerf et du crédit à cette intrigue où s'affrontent mafia israélienne et triades chinoises. Des règlements de comptes au cours desquels le commandant Paul Dalmate découvrira la présence dans nos tranchées de ces guerriers noirs de Harlem, les "Hellfighters", et des "Célestes", les cent-quarante-mille Chinois très mal accueillis venus suppléer le manque de main-d'œuvre. Prodigieuse excursion dans le passé pour enrichir l'éclairage de la Grande Guerre.


La Porte du vent - Jean-Marc Souvira – Pocket – 768 pages – 9,70€ - ***
Lionel Germain