jeudi 3 octobre 2013

Confessions criminelles

   
L'épique et l'intime se mêlent à merveille dans cette enquête sur un enlèvement (celui de la fille du gouverneur de Louisane), prétexte à une autopsie du système politico-mafieux américain.
 
 
Ray Hartmann originaire de la Nouvelle Orléans est recruté par un enquêteur fédéral de New-York pour travailler sur le crime organisé. En pleine tourmente conjugale, les agents du FBI viennent le dénicher pour l'emmener à la Nouvelle-Orléans où le kidnappeur exige mystérieusement sa présence. Loin du lyrisme compassionnel de James Lee Burke, Ellory décrit la Louisiane avec le regard sans complaisance de Hartmann: "C'était un pays cruel et vide, dont la seule grâce était peut-être la population elle-même, cette population fidèle aux intentions et aux résolutions des ancêtres qui avaient arraché leur vie à l'étreinte des marécages".
 
 
Le kidnappeur, un vieux tueur à gages de la mafia, affirme qu'il peut libérer son otage à la seule condition qu'Hartmann écoute sa confession. Ce long récit est une plongée dans l'histoire du crime aux Etats-Unis mais la voix qui le porte, glaçante et d'une précision clinique dans la description des meurtres, nous rappelle parfois celle de Martin Michael Plunkett, le personnage que James Ellroy mettait en scène dans "Un tueur sur la route". Celui d'Ellory, chroniqueur du versant sombre de l'Histoire, analyse sa propre condition avec une acuité troublante, méprisant l'empathie du lecteur qui s'identifie à Hartmann, récupérant son innocence aux confins de l'horreur, et redevenant peu à peu cet "enfant sous les étoiles" dont le prélude bercé d'un deuil insurmontable annonce le crépuscule.
 
Vendetta – R.J. Ellory – Traduit de l'anglais par Fabrice Pointeau – Sonatine – 652 pages – 23 euros -
Livre de poche – 768 pages – 8,10€ - ***
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche – 13 septembre 2009
 
 
 
Le titre initial de cet article dans "Sud-Ouest" était: "Un enfant sous les étoiles". Je l'ai changé pour éviter toute confusion avec la publication du roman suivant d'Ellory, "Mauvaise étoile".