mercredi 9 octobre 2024

La Belle, le Curé et les grands Anciens


Le nouveau roman de Nicolas Beuglet coche presque toutes les cases du thriller, avec brio: course poursuite à travers des paysages contrastés, la Géorgie, l’hiver, une riche demeure isolée dans la neige, puis l’université de Berkeley, les savanes d’Afrique du sud, l’Autriche, l’Allemagne; couple d’enquêteurs atypique – une experte en art, un ancien flic devenu prêtre; ennemis cachés jusqu’aux sommets de l’État ne reculant devant aucun crime; touche d’ésotérisme enfin avec le secret que recèlent peut-être d’énigmatiques capsules temporelles, – et de science-fiction, avec un possible signal venu de l’espace. 



Mais à trop étreindre… La psychologie des personnages en pâtit, déjà: le prêtre donne deux versions de son passé, guère plus crédibles l’une que l’autre; et la plupart des autres protagonistes manquent d’épaisseur. Seule la jeune experte, Felicia, peut-être la véritable héroïne de l’histoire, s’en sort sans trop de dommages, au propre comme au figuré – elle rejoint là les personnages de femmes auxquelles Beuglet nous a habitués, Grace Campbell, Sarah Geringën. 



La gêne qui s’installe entre les deux personnages obligés à une certaine promiscuité tout au long du récit est souvent meublée par des considérations théologiques un peu rapides, et le professeur Similak, qui propose d’introduire 3% de gênes néandertaliens dans le génome humain tient deux discours contradictoires à la fin, devant deux interlocuteurs différents – ce que remarque Felicia d’ailleurs, sans que le lecteur en soit éclairé pour autant. 

Certes, ce roman nous fait découvrir l’ITCS (International Time Capsule Society) qui recense toutes les capsules temporelles existant de par le monde (179 en France), nous retrouvons le SETI que nous connaissions à travers le GEPAN, auquel nous avait familiarisé l’excellente série française Ovni(s), et une note de l’auteur en fin d’ouvrage nous apprend qu’il a eu l’idée du "projet 3%" en lisant le livre du professeur Slimak sur les néandertaliens. 

Ludovic Slimak est devenu Svan Similak dans le livre. Donc, tout est vrai ou presque. Mais trop d’infos nuisent au "page turner" de ce thriller hyper-documenté, le lecteur cliquant souvent sur Wikipédia pour vérifier l’exactitude ou pas de tel ou tel passage, ou étant tenté d’aller sur Street View pour voir au cas où – Beuglet avouant dans l’entretien qui figure dans le dossier de presse ne choisir pour ses romans que des lieux où il n’est jamais allé…

L’Ultime avertissement – Nicolas Beuglet – XO Éditions – 301 pages – 21,90€ - *
François Rahier