mercredi 30 septembre 2020

Froid dans le dos


Une aventure de Servaz au menu d'une rentrée littéraire décalée, c'est une promesse d'échapper au confinement urbain en respirant l'air des hauteurs pyrénéennes. La vallée fictive où se délocalisent nos frissons de lecteurs attire un Servaz en rupture de SRPJ pour cause de conseil disciplinaire. 




A l'origine de l'escapade, un appel au secours d'une femme perdue de vue depuis une de ses précédentes enquêtes. Bernard Minier met le paquet pour que le huis-clos montagnard nous rappelle les bons souvenirs de "Glacé", notamment en retrouvant la gendarme Irène Ziegler. Les habits ne font pas le moine à l'abbaye, les enfants sont inquiétants, la milice vengeresse s'organise, Servaz prend des coups, et à la fin de l'épisode, le happy end semble très provisoire.



La Vallée – Bernard Minier – XO éditions – 528 pages – 21,90€ - ***
Lionel Germain




mardi 29 septembre 2020

La pie qui hante



La pie est un oiseau intelligent. Dans ce roman, elle figure aussi le point aveugle d'une enfance où le cancer s'annonce comme cet oiseau de mauvais augure. Aveugle, c'est le sort de Cyrus, le héros à canne blanche et humeur noire de Gabrielle Massat qui nous offre un surprenant polar dopé à la testostérone et malgré tout tempéré par la tendresse de son regard. Cyrus a quelque chose d'un Cyrano perdu dans une Californie de roman noir. Enfance maudite, mère indigne, vengeance impitoyable, il relève tous les défis, prend tous les mauvais coups, et ne renonce jamais au panache.



Le goût du rouge à lèvres de ma mère – Gabrielle Massat – Éditions du Masque – 480 pages – 20€ - ****
Lionel Germain




lundi 28 septembre 2020

Ce bon Pidou




C'est Pidou, un cocker roux qui lève la patte sur les voitures de la rue Linné. Enclin aux confidences, il nous raconterait ce que sa maîtresse, la gardienne de l'immeuble a lu dans le "Parisien". Un mystérieux Front Républicain Populaire a fait frissonner la France en multipliant les actions violentes, jusqu'aux enlèvements relayés par des "clips" détournant les vidéos commerciales. Ironie, humour glacé, l'héritage "situationniste" curieusement réinvesti dans une forme qu'il exècre. 



Attentifs ensemble – Pierre Brasseur – Rivages – 253 pages – 19,90€ - ** 
Lionel Germain




samedi 26 septembre 2020

De Lunel à Bengazi


On l'a sans doute déjà oublié, mais ce qu'on persiste à appeler "le printemps arabe" a commencé en janvier 2011 par l'immolation d'un jeune Tunisien. 



"La Fabrique de la terreur" a puisé sa matière première dans le désespoir de cette jeunesse arabe. Frédéric Paulin accorde la grande histoire contemporaine aux destins des personnages qu'on a découverts dans les deux premiers volets de la trilogie. Benlazar est à la retraite mais le mot lui fait horreur. Son amie de cœur, Laureline Fell, patronne du renseignement à Toulouse, et sa fille Vanessa, journaliste free-lance, rythment cette épopée consacrée à l'émergence du terrorisme islamiste. 




La Fabrique de la terreur – Fréderic Paulin – Agullo noir – 364 pages – 22€ - **** 
Lionel Germain




vendredi 25 septembre 2020

Jeu de rôle




Martina est une jeune fille que le chômage menace d'un retour au foyer familial. Par une amie de lycée, elle se retrouve embauchée par une vieille femme fortunée persuadée de vivre dans les années 40. Voilà un thriller subtil où le décor figé semble avoir la capacité d'arrêter le temps pour les personnages. Marie Hermanson fait basculer le réel dans un flou fantastique avec une habileté qui rappelle Shirley Jackson




Le pays du crépuscule – Marie Hermanson – Traduit du suédois par Johanna Chatellard-Shapira – Actes sud actes noirs – 288 pages – 22€ - ***  
Lionel Germain




jeudi 24 septembre 2020

Zéro absolu






Un monde rongé par l’entropie dans lequel les objets du quotidien perdent leur forme usuelle. Un environnement où n’existe que ce qui est nommé, étiqueté. Un monde blanc, froid, vide. De petites colonies humaines y sont soumises à un contrôle total régissant jusqu’à l’hygiène intime. Cette dystopie aux accents kafkaïens est le premier roman d’une jeune suédoise qui dit n’avoir pas lu 1984 d’Orwell. 




Amatka - Karin Tidbeck - Traduit de l’anglais et du suédois par luvan -  La Volte - 217 pages - 20€ - Folio Gallimard - 320 pages - 8,50€ - **** 
François Rahier – Sud-Ouest-dimanche – 22 avril 2018










mercredi 23 septembre 2020

Noir d'homme



Quand on ouvre un roman de John Connolly, il faut se persuader que c'est sur l'envers du monde visible que le noir va diffuser sa peur. Charlie Parker, le privé au nom sanglé dans un étui de saxophone, traque les fantômes, et le "pacte de l'étrange" ne déroge pas à cette perméabilité du réel avec l'univers secret des esprits. L'homme qui a disparu et qu'un agent du FBI le charge de retrouver était aussi passionné par cette hypothèse. Mais dans le monde selon Connolly, les revolvers et les couteaux continuent de remplir les morgues avec de vrais cadavres. 



Le pacte de l'étrange – John Connolly – Traduit de l'anglais par Jacques Martinache – Presses de la Cité – 494 pages – 22€ - *** 
Lionel Germain




mardi 22 septembre 2020

Du côté brun





Dans le polar, la montée des périls est souvent la même d'un livre à l'autre à une époque donnée. La nôtre, avant l'apparition d'un mystérieux virus, fait toujours face à la menace terroriste. Pierre Pouchairet, dans l'écurie des flics écrivains, lorgne ici du côté brun de la menace. Deux femmes flics aux commandes d'une intrigue où le Djihad à la française provoque des réactions factieuses. 





Larmes de fond – Pierre Pouchairet – Filatures – 416 pages – 18€ - *** 
Lionel Germain




lundi 21 septembre 2020

Secrétaire particulière



Tout commence par une petite leçon de littérature: comment réussir un bon frisson à la sauce polar, avec des ingrédients à l'ancienne qui permettent de mitonner l'invisibilité du coupable. "Dans la vraie vie, ça ne se passe pas comme ça". Et bien-sûr, la vraie vie, elle est dans le livre qu'on tient entre les mains. Une secrétaire, indispensable, invisible et dévouée, au service d'une patronne d'exception. Jusqu'au jour où toutes les couleurs se renversent pour nourrir la zone grise où la brutalité triomphe. Un scénario à la Hitchcock.



La Confidente – Renee Knight – Traduit de l'anglais par Séverine Quelet – Fleuve noir – 400 pages – 20,50€ - *** 
Lionel Germain




samedi 19 septembre 2020

Sur le fil


L'homme existe. Il s'appelle Philippe Petit et il s'est bien promené sur un fil tendu entre les Twin Towers le 7 août 1974. Mais si le funambule n'est pas le héros de Colum McCann, le funambulisme littéraire caractérise cette œuvre qui traverse un moment de l'histoire américaine en tissant le destin de personnages anéantis ou sublimés par le malheur. 




De ce patchwork émerge la figure du mystique introverti à la recherche d'une humanité perdue dans les bordels de New-York, celle des mères dont les fils sont morts au Vietnam, le choc des couleurs et des cultures entre Park Avenue et le Bronx, et la fragilité du lien qui retient ses âmes au bord de l'abîme. Magnifique. 





Et que le vaste monde poursuive sa course folle – Colum McCann – Traduit de l'anglais (Irlande) par Jean-Luc Piningre – 10/18 – (2016) – 476 pages – 8,80€ - (Première édition française chez Belfond en 2009) - *****
Lionel Germain




vendredi 18 septembre 2020

Le milieu de l'Empire




Hadrien, junkie et peintre, est un héros très inattendu dans un décor de Chine contemporaine où l'on plaisante rarement avec la transgression. En compagnie d'une journaliste, il enquête en marge de la procédure officielle sur le meurtre d'une jeune femme, épouse de leur interprète. Pour disculper celui-ci et l'amie occidentale d'Hadrien également impliquée dans l'affaire, il lui faudra s'aventurer au cœur d'un Pékin moins fréquentable que celui des brochures publicitaires. Virée mouvementée dans une des sociétés les plus inégalitaires du monde. 




Beijing Blues – Charlotte Cahné – Le Masque poche – 300 pages – 9,10€ - *** 
Lionel Germain




jeudi 17 septembre 2020

Dans les mailles du Cyberspace





La parution de "Neuromancien" en 1985 a changé la donne: le roman de Gibson constitue le fleuron du mouvement cyberpunk  qui a inspiré aussi bien le film "Matrix" que le manga "Akira". Une bibliographie exhaustive accompagne ce dossier rythmé par des articles de fonds, des entretiens et un guide lecture. Prélude d’une série de nouveautés à paraître, dont un roman graphique tiré d’un scénario inédit d’Alien III.




William Gibson, auteur matriciel - revue Bifrost n°96 - Éditions du Bélial’ - 191 pages - 11€ - ****
François Rahier – Sud-Ouest-dimanche – 3 novembre 2019



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mercredi 16 septembre 2020

Le sursis de Dallas


Le 22 novembre 1963, une jeune journaliste, Jean Boyd, croise la route d'un ancien marine, Lee Oswald, et ce simple contre-temps renverse le cours de l'Histoire. 



R.J. Ellory accorde un sursis à John Fitzgerald Kennedy pour mieux dépoussiérer les zones d'ombre de la présidence. On sait qu'elles ne manquent pas et que les femmes y occupent une grande place. A travers l'enquête d'un autre journaliste, Mitch Newman, c'est l'arrière-plan sordide où évolue le charismatique président qui révèle les failles de la Maison-Blanche. Et comme toujours, Ellory fait preuve d'un talent incroyable pour donner vie à ses personnages.





Le jour où Kennedy n'est pas mort – R.J. Ellory – Traduit de l'anglais par Fabrice Pointeau – Sonatine – 432 pages – 22€ - ***
Lionel Germain




mardi 15 septembre 2020

Une victime très coupable


On la connaît sous le nom d'Helen Fields, autrice de thrillers mettant en scène l'inspecteur Callanach mais H.S. Chandler livre ici un roman qu'on peut qualifier de judiciaire et en tout cas très en phase avec la période "Me Too". 



La première héroïne, Maria, se retrouve devant les jurés pour le meurtre de son mari. La deuxième, Lottie, appartient justement au Jury. Quand la première n'a pour sa défense que les stigmates d'automutilation à laquelle la condamnait son bourreau, la deuxième va vivre en direct sa première expérience d'emprise au sein même du tribunal. Deux trajectoires qui se croisent pour démontrer l'inventivité sans limite du prédateur, une victime très coupable.



Faites qu'il soit trop tard – HS Chandler – Traduit de l'anglais par Hélène Amalric – Black Lab Hachette livre Marabout – 352 pages – 19,90€ - ****
Lionel Germain




lundi 14 septembre 2020

Une femme blessée


Quand on évoque les reines du crime, on pense souvent à de gentilles petites vieilles dames assises dans un salon victorien devant une tasse de thé. Charlotte Link est assurément une des têtes couronnées du polar mais elle est allemande et pratique plus volontiers le suspense psychologique que le mystère en chambre close.



Dans "Les disparues de la lande", on découvre en France le personnage de Kate Linville, enquêtrice à Scotland Yard. Solitaire et méfiante, elle apparaît dans un premier roman non traduit encore où elle est bouleversée par la mort de son père. A Scarborough, dans le nord de l'Angleterre, elle revient pour vendre la maison familiale et retrouve l'inspecteur alcoolique chargé de l'enquête sur la mort de son père. Des disparitions d'adolescentes vont la contraindre à rester sur place. 



Charlotte Link livre une intrigue assez convenue mais le portrait de Kate en femme blessée, malmenée par les hommes dont elle tombe amoureuse, permet d'animer le paysage austère de la lande.

Les disparues de la lande – Charlotte Link – Traduit de l'allemand par Corinna Gepner – Presses de la Cité – 462 pages – 21€ - *** 
Lionel Germain




samedi 12 septembre 2020

La vie hors de soi


Sarah Elaine Smith est née et a vécu à Greene County, une bourgade de Pennsylvanie dans laquelle évoluent les personnages de son premier roman. Elle a publié un recueil de poèmes en 2012 et conformément à la tradition américaine a exercé une quantité de petits métiers avant de se consacrer à l'écriture. Pour Cindy, l'héroïne adolescente qui navigue dans le trou noir existentiel de cette petite ville du Comté, le vide se comble le jour où elle s'arroge la place de Marilou, une autre jeune fille disparue un soir d'été. 



Marilou est une métisse. Dans la vraie vie, elle s'appelle Jude et le frère de Cindy était son ami de cœur. Sa mère vit elle aussi en marge, "une rumeur disait qu'elle était arrivée à Greene County nue sur un cheval. (…) Parfois, elle pratiquait des guérisons aux cristaux devant le présentoir à sandwiches à la station-service". 






C'est auprès de cette femme alcoolique que Cindy creuse peu à peu la fiction d'une identité d'emprunt, accolant sa folie douce au désespoir d'une mère qui résiste au réel. Happée par un bovarysme incontrôlable, Cindy ne peut vivre que "hors d'elle" en se réinventant au fil des jours. Et la prouesse de Sarah Elaine Smith est de transcender la banalité répétitive de cet univers sans horizon par une écriture magistrale, envoûtante et poétique.

Marilou est partout – Sarah Elaine Smith – Traduit de l'américain par Héloïse Esquié – Sonatine – 320 pages – 21€ - **** 
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche - 6 septembre 2020



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vendredi 11 septembre 2020

Promenade des cinglés


Mary est une jeune fille bien. Étudiante en droit, elle prépare le concours de la magistrature. Son père flic est mort en service commandé. Reste Mathieu, l'ami de la famille, flic également mais à la retraite. À eux deux, ils s'inventent de nouveaux liens scellés par quelques verres de whisky. Mathieu s'est engagé dans la protection d'une jeune fugueuse, Maud, dont le clan est un charmant ramassis de cinglés. 




Sur fond de drogue et de sexe, Lucie Hogate active un personnage de détective féminin amateur assez conventionnel. On a parfois l'impression de voir évoluer ce casting en état d'ébriété dans une parodie de roman gothique. Scénariste et romancière, Lucie Hogate  était le pseudonyme de Mireille Lanteri, née en 1957 et disparue en 2009. 





Autopsie d'un mariage en blanc – Lucie Hogate – Engrenage Fleuve noir (1985), réédité chez J'ai Lu en 2014 sous le nom de Mireille Lanteri – 224 pages – 7,10€ - ** – 
Lionel Germain 





jeudi 10 septembre 2020

Espèces menacées




À l’heure où la réintroduction de l’ours fait débat dans nos montagnes, ce livre choisit la part du rêve, ou du cauchemar. Un quadra au chômage, informaticien de son état, revient dans le petit village pyrénéen où il a passé son enfance; il ne sait pas encore la forme qu’y prendra son destin. Entre polar régional et thriller ésotérique, de la préhistoire à nos jours, l’auteur, ariégeois, scrute des zones d’ombre et esquisse une mythologie.




Artahe le Dieu-Ours - Philippe Ward – Cairn - 282 pages - 17€ - ***
François Rahier – Sud-Ouest-dimanche – 29 avril 2018





mercredi 9 septembre 2020

Loubards lombards




Carlo Monterossi est devenu riche par hasard au moyen d'une idée débile exploitée jusqu'à l'essorage définitif de son amour propre par la télévision. Mais son vrai problème, ce sont plutôt les mobiles de ceux qui cherchent à l'assassiner. Dans un premier roman bourré de talents mais pas mal décousu, Alessandro Robecchi aligne des tueurs venus de tous les horizons pour régler dans Milan les contentieux du nazisme européen. Polar lombard un peu bavard, mais avec du swing et de l'humour.




Ceci n'est pas une chanson d'amour – Alessandro Robecchi – Traduit de l'italien par Paolo Bellomo – Éditions de l'Aube, collection Aube noire – 416 pages – 19,90€ - ***
Lionel Germain




mardi 8 septembre 2020

Un homme va mourir


John Grisham nous surprendra toujours. Sa vision critique reste singulière pour un auteur mainstream même si à la fin de la plupart de ses romans le happy-end réduit la portée du regard sur le système américain. On a forcément ça à l'esprit quand on ouvre "La Sentence". Ça et la certitude de passer un bon moment, parce que l'écrivain a un vrai talent pour harponner son lecteur en quelques lignes: 




"Début octobre 1946, par un matin froid, Pete Banning s'éveilla avant l'aube. Il savait qu'il ne se rendormirait pas. Longtemps il resta étendu au milieu du lit, à regarder le plafond sombre, en se demandant pour la millième fois s'il trouverait le courage d'aller au bout. Enfin, quand les premières lueurs du jour apparurent aux fenêtres, il accepta la réalité implacable: il était temps de tuer."




L'homme qui se lève est un vétéran honoré de la Seconde Guerre mondiale. Et celui qu'il va tuer est un révérend tout aussi respecté, le révérend Dexter Bell. S'il n'y a donc aucun suspense autour de l'identité du meurtrier, le mystère reste entier et s'épaissit même au fil des chapitres sur les mobiles de l'acte. Dexter Bell était un ami de Pete Banning et rien de convaincant ne filtre sur les raisons du meurtre. L'assassin est donc arrêté et le procès s'annonce sans surprise puisque le coupable est mutique et ne désire même pas qu'on fasse appel de sa condamnation à mort.

C'est vraiment le roman le plus dense de John Grisham qui fait le procès impitoyable de la guerre et de ses prétendus héros à commencer par Mac Arthur. Puissant et habité par le silence de ce personnage qui nous accompagne jusqu'au dénouement, le livre est passionnant. 

La Sentence – John Grisham – Traduit de l'américain par Dominique Defert – Lattès – 500 pages – 22,90€ - ****
Lionel Germain




lundi 7 septembre 2020

Cerveau faussaire




Daria Desombre est née à Saint-Pétersbourg mais elle a étudié à l'Institut Français de la Mode à Paris. Et c'est en russe qu'elle écrit sa série policière consacrée à Macha Karavaï, stagiaire à la Petrovka, la police moscovite. Elle forme un tandem très séduisant avec Andréï Yakovlev pour tenter de coincer le cerveau malade qui assassine les jeunes femmes en abandonnant près des victimes une esquisse du peintre Ingres. Une bonne série B malgré la figure ressassée du serial killer. 



Les Disparues du tableau – Daria Desombre – Traduit du russe par Julia Chardavoine – Le Masque – 352 pages – 21,50€ - **
Lionel Germain




samedi 5 septembre 2020

Ombre et lumière


Soneri n'est pas un héros de roman. Ce personnage de commissaire parmesan créé par Valerio Varesi est l'interface entre deux mondes. Celui baigné de lumières vives qui dessinent l'ordinaire de nos jours, et l'autre inscrit sous le brouillard de nos incertitudes. Le dernier roman publié chez Agullo donne la clé de ces deux univers dans le portrait d'une immigrante roumaine. 


En enquêtant sur Nina Iliescu, dont le corps carbonisé est découvert au bord de la route après un monstrueux carambolage, Soneri exhume le dossier d'une Europe dans laquelle les Roms sont les brigades mobiles du crime organisé. Or, drogue, prostitution, la jeune Roumaine a su embobiner quelques notables mais le commissaire refuse de la réduire à ce qu'elle devient sous les projecteurs de la médecine légale. En proie à ses propres tourments amoureux, il préfère la réinventer sans s'interdire de coffrer les coupables.



Ce flou protecteur préserve l'innocence du regard sur la beauté du monde. Une beauté qui se diffuse autant dans la splendeur des paysages de l'Émilie romagne qu'à la table d'un bar à vin obscur où se dégustent le "culaccia" et la "coppa" arrosés d'un bon cru. Varesi, c'est l'équilibre parfait entre les ombres et la lumière.

Or, encens et poussière – Valerio Varesi – Traduit de l'italien par Florence Rigollet – Agullo noir – 320 pages – 21,50€ - *** 
Lionel Germain





vendredi 4 septembre 2020

Polar en cage


Pseudonyme de Christian J. Mandon disparu en 2008, David Morgon, dont chaque roman proposait une recette de cuisine, est aussi le héros de ses propres livres. Plus d'une trentaine d'aventures publiées au Fleuve noir. Ce qui donne à celle-ci une originalité particulière, c'est qu'elle se déroule pendant la première fête du livre de Saint-Etienne les 17, 18 et 19 octobre 1986. 


Le détective y traverse une place où "dans une  cage vitrée, un auteur téméraire écrivait un polar pendant les trois jours que durait la manifestation." Cet auteur, vous l'avez deviné, c'était David Morgon qui allait gagner son pari de pondre "Allée du Crêt-de-Roc" dans les délais. Une jeune fille assassinée dans un cimetière et de méchants secrets de famille au menu du Privé qui n'a pas de quoi payer son tiers provisionnel mais qui possède tous les disques de McCoy Tyner et réussit comme personne les gâteaux de foie de volaille.



Allée du Crêt-de-Roc – David Morgon – Fleuve noir (1987) - **
Lionel Germain

                                         









jeudi 3 septembre 2020

Salut la compagnie!



Moins connu que son homonyme du "Salaire de la peur", cet Arnaud-là n’en est pas moins un des plus grands romanciers populaires du XXe siècle. Avec plus de 400 titres à son actif et sa célèbre "Compagnie des glaces" forte de 62 volumes et déclinée en BD, série TV et jeu vidéo, il figure aussi parmi les grands de la SF d’aujourd’hui. Cet impressionnant dossier tente de rendre compte de toutes les facettes de son talent. Georges J. Arnaud est mort le 26 avril 2020.



Le multiple Georges-J. Arnaud - Revue Le Rocambole n°88-89, Encrage/Belles Lettres - 352 pages - 30€ - ****
François Rahier – Sud-Ouest-dimanche – 15 décembre 2019




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mercredi 2 septembre 2020

Divan de famille




Parfois tout est dans le titre. Quand il s'agit de polar, on ne souhaite que rarement sans arrière-pensée une bonne nuit à quelqu'un. Tandis que Seon-Gyeong, l'héroïne de Seo Mi-Ae, est confrontée à un serial killer désireux de se confesser à une criminologue, elle accueille la fille d'un premier mariage de son mari. Entre le tueur psychopathe et la gamine perturbée, le cœur du lecteur balance au-dessus du vide.




Bonne nuit maman – Seo Mi-Ae – Traduit du coréen par Kwon Jihyun et Rémi Delmas – Matin Calme éditions – 360 pages – 21€ - ***
Lionel Germain




mardi 1 septembre 2020

Des fifres et des lettres



Un polar musical dont le rock n'est pas l'argument principal, ça change un peu. Pas le jazz, non plus, qui rime avec la noirceur d'après-guerre, mais l'opéra façon "Diva", comme Beineix nous l'avait vendu sur un roman de Delacorta. Riche et mélomane, Gérard Gémeaux meurt d'un accident suspect en laissant un magot en bitcoins sur un compte fermé par un code à 80 caractères. Du Miserere d'Allegri au Requiem de Verdi, c'est une vingtaine d'œuvres qui ont servi au chiffrage. Et au cœur de l'énigme, une magnifique cantatrice dont le cœur est à prendre.


Le Code et la Diva – Christian Grenier – Rouergue noir – 416 pages – 23€ - ***   
Lionel Germain