lundi 31 août 2020

Odessa USA





Le 14 février 1976, elle a quatorze ans et s'appelle encore Gloria Ramirez quand elle surgit défigurée sur le palier de Mary Rose Whitehead à Odessa pour demander de l'aide. Portrait d'une survivante qui se débaptise pour abandonner son statut de victime et affronter légalement son agresseur. La parole ne se libère que du côté des femmes dans un pays où l'on ignore que le pétrole qui jaillit ne promet pas le paradis mais l'enfer.




Glory – Elizabeth Wetmore – Traduit de l'américain par Emmanuelle Aronson – Les Escales – 320 pages – 21,90€ - ***
Lionel Germain




samedi 29 août 2020

L'appât


"L'appât s'est mis à se débattre, à essayer d'échapper à la corde serrée. Comme tous les autres. Nun ne peut pas leur reprocher de tenter de fuir, il ferait de même. Et puis cela crée du mouvement, du souffle court et rauque des bêtes qui fatiguent, et la jungle bouge avec l'appât, l'enveloppe, porte ses plaintes jusqu'aux lacs, jusqu'aux plaines, jusqu'aux caches les plus reculées. C'est ainsi que le tigre arrive: parce que l'appât concentre tout le bruit de la forêt. Parce que, en croyant saisir sa dernière chance, il signe son arrêt de mort."




Animal – Sandrine Collette – Denoël Sueurs froides – 283 pages – 19,90€ - ***



Lire aussi sur le site de l'éditeur




vendredi 28 août 2020

Black Bayou


Trop de malheurs tue le malheur. Et ce n'est pas de gaieté de cœur qu'on peut reprocher à Dave Robicheaux ses trois veuvages, sa lutte contre les démons de l'alcool et la menace qui pèse sur les épaules de sa fille adoptive Alafair.



N'empêche qu'un état de grâce permet à James Lee Burke de nous promener encore sur plus de 500 pages avec son héros magnifique. Ombre et lumière se partagent le mérite d'éclairer ou d'obscurcir les ambitions du cinéaste Desmond Cormier tandis qu'une femme noire ligotée à une croix de bois flotte sur les eaux du Bayou. Tragique, lyrique, l'éternité du combat entre le bien et le mal.





New Iberia Blues - James Lee Burke – Traduit de l'américain par Christophe Mercier – Rivages Noir – 560 pages – 23,50€ - ***  
Lionel Germain




jeudi 27 août 2020

L'Antiquité sans peine





Pour réviser ses humanités, on peut plonger dans le dernier péplum Netflix, ou ouvrir ce livre au titre improbable. En 421 av. J.-C. la guerre fait rage entre Athènes et Sparte, Aristophane s’inquiète du piteux état des phallus de carton dont il affuble ses acteurs et les dieux se démènent pour calmer les humains. Un jeune nigaud et une nymphe un peu sotte surfent sur la vague.





La déesse des marguerites et des boutons d’or - Martin Millar - Traduit de l’anglais (Écossais) par Marianne Groves - Folio SF - 280 pages – 7,80€ - ****
François Rahier – Sud-Ouest-dimanche – 15 avril 2018





mercredi 26 août 2020

Lady et le petit nègre


Easy, un jeune Noir qui travaille en usine, se retrouve détective amateur après avoir perdu son emploi. On est à Los Angeles en 1948 et son "client" lui demande de retrouver une jeune et jolie Blanche qui fréquente les quartiers "nègres". 



Easy aime écouter Lady Day dans le bar clandestin de Central Avenue. Personnage sympathique engagé comme "une parcelle de l'espoir du monde", il s'aperçoit vite que la ségrégation raciale règne avec autant de vigueur dans l'armée des "libérateurs" que dans le Sud profond. Violence et racisme au cœur d'une œuvre adaptée au cinéma avec Denzel Washington, "Le diable en robe bleue" était le premier roman de Mosley fils d'un Afro-américain et d'une mère juive d'origine polonaise. 




Le diable en robe bleue – Walter Mosley – Série noire - ***
Lionel Germain








mardi 25 août 2020

La dernière séance


"Lisez. Allez au cinéma", c'est le dernier avertissement que donne Lucie Brémeault au lecteur encore sous le charme qui vient de refermer son livre. Un premier roman dont le générique éclaire le visage terrifié de Rachel Baker, figée au cœur du carnage au fin fond de l'Alabama. La jeune serveuse de ce "diner" vient d'assister impuissante au massacre des clients, femmes, enfants, amoureux compris. Passée la sidération, Rachel se vengera en assassinant à son tour le suprémaciste blanc responsable de la tuerie.




C'est donc en prison qu'elle va se reconstruire dans la confrontation avec d'autres femmes tourmentées et dans la relation avec le vieux flic en charge de l'affaire. Puissante évocation d'un destin de femme à laquelle il est difficile de ne pas s'attacher, le roman "américain" de Lucie Brémeault offre un remarquable travelling sur l'Amérique contemporaine.





La seconde vie de Rachel Baker – Lucie Brémeault – Plon – 276 pages – 18,90€ - ***
Lionel Germain





lundi 24 août 2020

Le fruit de vos entrailles



L'éditeur parle de virtuosité à propos de ce roman adapté par la BBC en 2018. Difficile de contester l'argument publicitaire. Helen Fitzgerald s'empare d'un thème, le meurtre d'un bébé, que le polar répugne en général à aborder de front. Ici pas de pédophile monstrueux ou de tueur en série hagard mais un couple parfait en apparence et un bébé qui pleure beaucoup dans l'avion. C'est mince et c'est pourtant l'horreur à l'arrivée. La machine infernale va se refermer sur la Maman, innocente et coupable, tandis que se dessine un triangle maudit: victime, sauveur, prédateur. Une fugue en trois mouvements, et on l'a déjà dit, une virtuose au clavier.



The Cry – Helen Fitzgerald – Traduit de l'anglais par Alexandre Civico – Equinox Les Arènes – 400 pages – 18€ - ****
Lionel Germain