mercredi 26 juin 2013

Hollywood est un roman noir


Boulevard du Crépuscule en 1950 signe peut-être la fin du paradis artificiel ou du moins de son adresse sur Terre. Dans ce film de Billy Wilder on y croise quelques uns des fantômes que Kenneth Anger débarrasse de leur voile pour nous laisser méditer sur l'affreuse nudité des cadavres.


De 1915 aux années soixante, avec plus d'une trentaine de scènes fatales éclairées par l'identité judiciaire, nous découvrons ce après quoi nous ignorons courir au plus fort de nos dénégations: la laideur des anges au tomber de rideau et cette insupportable odeur de mort qui coiffe les parfums sucrés des suites hollywoodiennes. Les femmes très belles y étaient malheureuses, les beaux mecs guère plus heureux. Et la kyrielle d'ogres et d'ogresses dont tous les contes de fée raffolent sombraient parfois eux aussi dans le désespoir.


Ainsi pour Fatty Arbuckle. La version de sa chute racontée par Kenneth Anger est beaucoup plus sombre et immorale que celle récemment publiée par Jerry Stahl. Kenneth Anger a trop flairé les marges pour se poser en moraliste. Ironique et cruel avec les sorcières de la presse (elles fournissaient la came tout en interdisant la consommation), il surgit un peu avant minuit pour nous montrer l'innocence de la reine et la brièveté de son destin.

Hollywood Babylone: catalogue funéraire rédigé avec l'acidité amoureuse d'un voisin de palier.

Hollywood Babylone – Kenneth Anger – Traduit de l'américain par Gwilym Tonnerre – Tristram – 310 pages – 11,95€ - ***
Lionel Germain


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