jeudi 31 octobre 2019

Vampire, vous avez dit vampire?





Loin d’être un avatar post-moderne qui plus est britannique, le vampire fut un personnage clé du romantisme français. De Nodier à Dumas en passant par Gautier ou Ponson du Terrail on le rencontre tout au long du XIXe siècle. Dans ce roman drôle et enlevé paru en 1867 l’auteur du “Bossu” enrôle même l’égérie du mouvement gothique anglais pour lutter contre le monstre aux yeux luminescents!




Ann Radcliffe contre les vampires - Paul Féval - Les Moutons électriques - 144 pages – 13€ - ***
François Rahier – Sud-Ouest-dimanche – 27 mai 2018




mercredi 30 octobre 2019

Tuer la galerie





Le tueur en série d'Antonin Varenne est un artiste qui travaille la scénographie de chacun de ses meurtres. Dans cette reprise entièrement remaniée d'un roman publié en 2006, on s'attache surtout au personnage du flic, aux échos lointains du drame qui frappe New-York en 2001 et à cette ville de Paris dont Antonin Varenne restitue avec une poésie vibrante la lumière et les ombres.




L'Artiste – Antonin Varenne – La Manufacture de livres – 320 pages – 19,90€ - ***
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche – 29 septembre 2019



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mardi 29 octobre 2019

Témoin à distance





Ce roman des années quatre-vingt, remanié par l'auteur, esquisse les dérives de l'Union que découvre un envoyé spécial écossais. Le crime dont est victime son confrère journaliste n'a qu'un témoin: une petite fille autiste. Peter May ressuscite l'Europe d'avant, celle des combines dont nous soldons les comptes aujourd'hui. Édifiant.




La petite fille qui en savait trop – Peter May – Traduit de l'anglais par Ariane Bataille – Rouergue – 320 pages – 22€ - *** 
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche - 15 septembre 2019



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lundi 28 octobre 2019

Attention Tanger





Tanger en 1956, chaudron où se mitonne l'indépendance, accueille une foule cosmopolite. On y assiste à la lente dérive de Lucy, sans doute victime de sa trop bienveillante amie Alice venue la rassurer sur son mari. Le poison du doute étourdit le lecteur de cette intrigue comparable au meilleur de Patricia Highsmith.






Tangerine – Christine Mangan – Traduit de l'américain par Laure Manceau – Harper Collins Noir – 320 pages – 20€ - ***
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche - 15 septembre 2019



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samedi 26 octobre 2019

"Ça vient du blues"





Pour qu'un roman vous arrache au monde, il lui faut posséder cette énergie mystérieuse qui aspire l'âme du lecteur, la téléporte dans un univers dont les contours lui deviennent bientôt aussi familiers que ceux du monde qu'il abandonne. Dans le roman de Hari Kunzru, les larmes sont blanches mais la mélodie est noire comme le premier blues échappé d'un champ de coton. 





C'est cette frontière entre les couleurs qu'on traverse avec le narrateur épris d'une musique étrangère à sa peau si pâle. Écoute le refrain fredonné par le "maître" blanc sur son cheval devant l'abreuvoir: "Un nègre meurt j'en prends un autre, une mule meurt je dois en racheter une autre". Blanc est la couleur du deuil, noir la couleur de l'espoir.

Larmes blanches – Hari Kunzru – Traduit de l'anglais par Marie-Hélène Dumas – JC Lattès – 372 pages – 21,50€ - ****
Lionel Germain







vendredi 25 octobre 2019

Secrets d'Histoire




Il rend à la nation des services très secrets. La revue l'Indic analyse l'espionnage: livres, films et séries qui jettent un œil au-delà des frontières. On y trouve une enquête passionnante sur Agatha Christie et ses incursions dans le roman d'espionnage, un face à face entre Alain Damasio et Benjamin Fogel, deux auteurs dont les œuvres ne sont pas assignées à un genre, et enfin l'actualité du polar décryptée par les chroniqueurs. 




L'Indic N°38 – Association Fondu au Noir – 48 pages – 7€ - *** 
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche - 22 septembre 2019



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Famille sicilienne





Tout le monde aura compris que sous la "pyramide de boue", c'est la Sicile qui se condamne à ne jamais respirer un air pur. Andrea Camilleri est mort le 17 juillet mais la voix du commissaire Montalbano nous parviendra encore, on l'espère, grâce aux inédits italiens. Ici, la mort d'un expert-comptable nous rappelle la toute puissance des "familles".




La Pyramide de boue – Andrea Camilleri – Traduit de l'italien par Serge Quadruppani – Fleuve noir – 240 pages – 19,90€ - ***
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche - 1er septembre 2019



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jeudi 24 octobre 2019

Aux temps d'avant




Finney n’est pas que l’auteur d’un seul livre, “L’invasion des profanateurs”, roman parano de l’Amérique des fifties souvent repris au cinéma. Ce voyage en douce dans un New York du passé, quasi proustien et joliment illustré de photos vintage, nous parle d’un temps où les choses ne passaient pas aussi vite, et dans lequel un homme blessé trouve sa résilience avec la plus simple des machines à remonter le temps – la mémoire.





Le Voyage de Simon Morley - Jack Finney - Traduit de l’américain par Hélène Collon - Folio SF - 643 pages – 9,40€ - ***
François Rahier – Sud-Ouest-dimanche – 14 janvier 2018




mercredi 23 octobre 2019

Mentir vrai





Le talent des avocats consiste à chercher sans cesse une réinterprétation du réel conforme aux intérêts de leurs clients. Une avocate de Las Vegas interroge cette vérité qu'on lui propose après l'annonce du coma dans lequel son frère est plongé. Meurtre ou suicide? Sarah J. Naughton brosse le portrait d'un personnage cynique et désabusé.






Une autre histoire – Sarah J. Naughton – Traduit de l'anglais par Pierre Szczeciner – Pocket – 504 pages – 8,30€ - ***
Lionel Germain




mardi 22 octobre 2019

Enfants meurtriers





Tout le nuancier du polar est convoqué par Stuart Neville depuis "Les Fantômes de Belfast" qui inaugurait sa série avec Jack Lennon. Abandonnant les mauvais esprits de l'Irlande, il raconte le destin tragique de deux enfants meurtriers dont la liberté au bout de sept ans n'est pas synonyme de paix. L'inspectrice et l'agente de probation qui accompagnent leur délivrance vont vivre un véritable cauchemar. Tragique et sombre. Non, pas sombre, noir!




Ceux que nous avons abandonnés – Stuart Neville – Traduit de l'anglais par Fabienne Duvigneau – Rivages noir – 370 pages – 22,50€ - *** 
Lionel Germain




lundi 21 octobre 2019

Tenir la dalle





Dalle de béton, zombies enracinés dans l'asphalte, le décor se superpose de faubourg en faubourg. On parle de France périphérique et Nathalie Sauvagnac y plante sa caméra subjective. Le narrateur survit dans un présent sans futur dopé aux mauvais rêves d'un pote marginal. On raconte des histoires aux enfants mais l'insupportable désamour d'une mère ne produit qu'un conte funeste. Polar minéral.





Les Yeux fumés – Nathalie Sauvagnac – Éditions du Masque – 190 pages – 19€ - ** 
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche - 13 octobre 2019



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samedi 19 octobre 2019

Méchant sablier




"La vie est ce petit rien que la mort nous laisse." C'est à cette citation de Walt Whitman que Jordi Ledesma a emprunté le titre de son roman. Dans une Espagne oblitérée par un soleil de plomb, le narrateur cherche à contrer l'usure du temps en reprenant la chronique d'une jeunesse assignée à la violence, à la drogue et à l'ennui. Entre les petits délinquants, les gros trafiquants et les étranges compromissions d'un commandant de la Guardia civil, les femmes sont les objets d'un désir tourmenté. Un tableau implacable de la prétendue douceur de vivre des stations balnéaires.



Ce que la mort nous laisse – Jordi Ledesma – Traduit de l'espagnol par Margot Nguyen Béraud – Asphalte – 208 pages – 20€ - ***
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche - 6 octobre 2019



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vendredi 18 octobre 2019

Tueur de chéries






Les tueurs en série commettent des erreurs. Celle de Joe Goldberg, c'est d'avoir oublié un mug d'urine sur les lieux de ses exploits. Exploits qui consistent à éliminer les femmes de sa vie. Caroline Kepnes réussit l'autre exploit de nous rendre sympathique ce libraire psychopathe. Deuxième épisode avec une reddition qui semble inévitable.





Les Corps cachés – Caroline Kepnes – Traduit de l'américain par Elsa Maggion et Perrine Chambon – Calmann-Lévy noir – 432 pages – 20,90€  - ***
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche - 1er septembre 2019



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jeudi 17 octobre 2019

Au pays du réalisme magique


C’est un pays improbable, figé dans une étrange raspoutitsa, la saison des mauvaises routes, un dégel interminable – ou l’hiver qui recommence déjà. Les étangs regorgent de piranhas, et donnent naissance à des bébés aux pouvoirs étranges qui deviennent parfois des arbres et prophétisent. 




Une humanité sinistrée y survit de boulots minables en coups foireux, comme Mykine et Mitrokhine, qui finiront par trouver cependant une mort quasi-glorieuse aux confins de la Mongolie. D’autres préfèrent opter pour l’agdam, le porto azéri, et se tuent à petit feu et sans raison. Le capitaine de police Sinitchkine dont les cuisses enflent démesurément espère quant à lui de jour en jour la visite des journalistes du Livre Guinness des records qui lui assureront peut-être une notoriété au moins posthume. 



En attendant il poursuit consciencieusement l’enquête sur la disparition et la mort probable du tatar Ilya, le marchand de poissons. Et Ilya, de métamorphoses en métamorphoses, devenu silure, pigeon, cafard, parcourt ce petit monde à la recherche de son amie d’enfance, la belle Aïza qui s’est jadis noyée. Éperdu d’amour pour toutes les créatures et surtout les plus humbles, il en arrive à penser que tout le monde a une âme, même les insectes. 

Dans cette Russie naguère promise à un avenir radieux, le réalisme socialiste a cédé la place au réalisme magique, juste retour des choses au pays de Gogol. L’auteur, que l’on compare là-bas à Garcia Márquez ou Salman Rushdie, en est un représentant notable. Le sommeil de la raison a engendré des monstres, dit-on. Fin conteur, Lipskerov, nous raconte qu’avant de s’endormir, la raison fait un dernier rêve, un rêve très long, presque autant que la vie… La vie protéiforme et déroutante à laquelle ce livre constitue une ode incongrue et sensible.

Le Dernier Rêve de la raison - Dmitri Lipskerov - Traduit du russe par Raphaëlle Pache - Agullo Fiction - 472 pages – 22,50€ - ****
François Rahier – Sud-Ouest-dimanche – 13 mai 2018





mercredi 16 octobre 2019

Le vrai du faux


Quelque part dans la banlieue de Philadelphie, ça commence comme un épisode de "Desperate Housewives". Julia est une mère heureuse et une femme comblée quand tout bascule sur un coup de fil. 



Bryan Reardon reprend les éléments clés qui faisaient déjà la force de "Jake", son premier roman. Que savons-nous de nos proches? Où est l'éthique des grands médias professionnels à la recherche d'une "vérité" toujours plus dérangeante? L'auteur lâche ses personnages dans l'arène où se pulvérise la version paisible d'eux-mêmes. Julia apprend que son mari est le responsable d'un attentat meurtrier. Sa disparition l'accuse. Mais qui est vraiment Michael Swann?




Le vrai Michael Swann – Bryan Reardon – Traduit de l'américain par Flavia Robin – Série noire Gallimard – 426 pages - 23€ - **  
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche - 25 août 2019



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mardi 15 octobre 2019

Chasse gardée




Une route de campagne bordée par les bois, un homme qui surgit face à la voiture, et c'est l'accident qui provoque la panique de l'automobiliste. Mais la victime avait déjà reçu une décharge de calibre 22 ce qui lui laissait peu de chances de survivre. Laurent Scalese mobilise deux flics pour enquêter sur cette affaire dont les prolongements mènent d'abord vers l'extrême droite et ses chasses suspectes avant de bifurquer vers une piste plus terrifiante. Le duo jeune femme flic et vieux commandant rouillé fonctionne agréablement.



Pour le bien de tous – Laurent Scalèse – Belfond – 320 pages – 20€ - ***
Lionel Germain




lundi 14 octobre 2019

Mathilde est revenue




La véritable énigme en littérature, c'est ce qui anime un personnage. Aux origines du polar, la récurrence signifiait le retour du même. La constance psychologique d'Hercule Poirot est aussi rassurante que la fin de l'histoire. Elena Piacentini inscrit son personnage dans la douloureuse incertitude contemporaine. L'intrigue autour de cette femme assassinée dont le bébé a disparu se double d'une interrogation sur les terreurs secrètes de Mathilde Sénéchal, la femme flic en charge de l'enquête.




Comme de longs échos – Elena Piacentini – Pocket – 320 pages – 7,20€ - *** 
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche - 8 septembre 2019



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samedi 12 octobre 2019

Succursale du ciel


Dans ce roman de Santiago Gamboa, les hommes sont en noir et les femmes prennent la lumière. Installée dans un quartier de Bogota, Julieta travaille comme journaliste. "Son seul luxe", c'est d'avoir à ses côtés une secrétaire, Johana. Si la passion de la journaliste consiste à comprendre la violence criminelle, celle de son associée concerne le maniement des armes.




Originaire de Cali, "la succursale du ciel", elle a passé douze ans chez les FARC. Avec un procureur d'origine indienne, les deux femmes enquêtent sur une scène de crime où tous les indices ont disparu sauf le principal témoin, un enfant perché dans un arbre. Enfants perdus, Narcos, terrorisme et mercantilisme religieux constituent le spectre sombre d'un pays impuissant à éradiquer les démons de sa guerre civile. 





Des hommes en noir – Santiago Gamboa – Traduit de l'espagnol par François Gaudry – Métailié – 368 pages – 21€ - ***
Lionel Germain




vendredi 11 octobre 2019

Contrebande





Le monde du polar ne pourra pas rallier Thierry Marignac aux multiples chapelles dédiées à son culte. Il ne refuse pas les étiquettes, il les pulvérise comme avec ce roman publié par la collection "nocturne" des éditions Les Arènes. Un tour d'horizon amoureux où se paraphrase le destin du dissident russe Limonov. Du "noir" de contrebande à prix modique.






L'Icône – Thierry Marignac – Equinox les Arènes – 272 pages – 12,90€  - ****  
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche – 8 septembre 2019



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jeudi 10 octobre 2019

De l'autre côté de l'Amérique





De la Côte Est à la Côte Ouest il n’y a pas que la mythique Route 66. Celle qu’emprunte le héros de ce road trip halluciné est marquée du Chiffre de la Bête. Unique incursion dans le post apocalyptique d’un auteur connu pour ses ouvrages de fantasy mythologique, ce bref roman écrit il y a 50 ans met en perspective tous les Mad Max présents et à venir – et en relief encore une fois le côté visionnaire de la SF.




Route 666 - Roger Zelazny - Traduit de l’américain par Thomas Bauduret -  Mnémos/Hélios - 218 pages – 8,90€ - ***
François Rahier – Sud-Ouest-dimanche – 14 janvier 2018




mercredi 9 octobre 2019

Œil pour deuil




Premier roman publié en France, "37 fois" révèle un auteur doué pour l'équilibre entre suspense et vérité des personnages. Un couple uni sur un secret d'adolescence, va devoir affronter les conséquences des non-dits du passé au moment où réapparaît un troisième larron. Focalisé sur le passage de l'innocence à la brutalité de certains désirs, le roman propose une analyse très pertinente de la violence sociale.






37 fois – Christopher J. Yates – Traduit de l'anglais par Pierre Szczeciner – Cherche Midi – 406 pages – 20€ - ** 
Lionel Germain




mardi 8 octobre 2019

Noir Bayou


Dans la Louisiane de James Lee Burke, le ciel du soir "d'un bleu passereau" est constellé de "nuages roses comme de la barbe à papa".



Dans la Louisiane de James Lee Burke, on peut voir flâner la silhouette vieillie de Dave Robicheaux à la recherche de son pote Clete Purcell et de sa Cadillac vintage garée sur St Ann Street quand les vapeurs épicées agacent le Vieux Carré de la Nouvelle Orléans. Avec Robicheaux en titre, James Lee Burke rend hommage au héros magnifique auquel Tommy Lee Jones a prêté sa stature. Entre les conséquences tragiques du deuil de sa compagne et l'irrésistible ascension d'un politicien séducteur et raciste, Robicheaux garde le cap de l'amitié. 


Robicheaux – James Lee Burke – Traduit de l'américain par Christophe Mercier – Rivages – 512 pages – 23€ - ****
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche - 11 Août 2019



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lundi 7 octobre 2019

Au-delà de l'humain



De quoi avons-nous le plus peur en ce moment? Avec les conséquences du réchauffement climatique, les manipulations génétiques et les extravagances de l'intelligence artificielle ont une grosse cote chez les auteurs de thriller. Dès le premier chapitre en compagnie de candidats à la GPA, on sent monter l'angoisse. Pour couronner le tout, la crue de la Seine annonce l'apocalypse. Loin du mythique 36 Quai des orfèvres, Sharko et les flics de la brigade installée dans leur nouveau "bastion" devront faire face à toutes les variantes du cauchemar transhumaniste. 




Luca – Franck Thilliez – Fleuve noir – 552 pages – 22,90€ - Pocket – 608 pages – 8,70€ - ** 

Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche – 28 juillet 2019





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