vendredi 30 mai 2014

Peur noire






 La comparaison entre auteurs contemporains est toujours un exercice un peu vain et risqué mais il est aussi inutile de taire la proximité d'inspiration et de style qui lie Michaël Mention et David Peace. L'un a dégainé plus vite que l'autre. Le Yorkshire et son éventreur résonnent désormais comme un standard sur lequel Michaël Mention a prouvé qu'il tenait le set à merveille. Excellent. Effrayant. Noir.





Adieu demain – Michaël Mention – Rivages – 375 pages – 8,15€ - ***
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche – 25 mai 2014




mercredi 28 mai 2014

Grosses commissions





 Ex-agent de la DGSE, le colonel Montserrat est mis sur la piste d'une affaire de rétro commissions obtenues par des hommes politiques africains et français lors du rachat de concessions minières. Vincent Crouzet ne manque pas d'arguments pour nous faire avaler sa salade radioactive. Il a travaillé pour le gouvernement français et son groupe français énergétique Murana nous en rappelle un autre bien réel. Croustillant. 



Radioactif – Vincent Crouzet – Belfond – 481 pages – 21,50€ - **
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche – 25 mai 2014




mardi 27 mai 2014

Bali de Vernes





 A part pour Francis Valéry ("Bob Morane, un mythe moderne" – éditions Le Bélial), l'Ombre Jaune a rejoint le purgatoire des héros de papier. Luc Chomarat décrit le bug éditorial qui nous prive d'un rêve sans prétention. Dans ce petit roman parodique, le Singapour de Bob Dumont, le Bali de Vernes, le banco à Bangkok d'OSS 117, tous les distributeurs de clichés sont sacrifiés sur l'autel impitoyable du marketing.



L'espion qui venait du livre – Luc Chomarat – Rivages – 190 pages – 7€ - **
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche – 25 mai 2014




lundi 26 mai 2014

Tout homme a un prix



 Avec ce premier roman Matthew Quirk fait jeu égal avec les grands du suspense. Pas le suspense des tables d'autopsie mais celui des sombres complots du pouvoir et de ses petits arrangements avec la démocratie.



 Son héros, Mike, est un jeune escroc dépouillé par les vautours du recouvrement de crédits. Il doit solder les 83 000 dollars de l'hôpital où sa mère est morte. C'est après avoir misé ses derniers neurones pour une rédemption illusoire dans un séminaire de Harvard qu'il tombe entre les griffes du gourou de Washington, Henry Davies, pour qui "tout homme a un prix". En croyant fuir son passé de délinquant, Mike découvre alors la perversité d'un monde pourtant si soucieux des apparences, collusion de desseins obscurs tapis dans les angles morts de la scène publique. 



 Voilà un tableau très convaincant de ces fastes irradiés par une lumière sale: pornographie immobilière, corruption des élites, fondations humanitaires qui sont des puits sans fonds où s'abreuvent les prédateurs. On est terrifié par l'ampleur du mal et très inquiet pour Mike, réduit à jouer les âmes damnées de ce lobbyiste sans scrupule.
   
Les 500 – Matthew Quirk – Traduit de l'américain par Hubert Tézenas – Pocket – 442 pages – 7,90€ -
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche – 25 mai 2014


Sélectionné pour le Prix du Polar Sud-Ouest/Lire en Poche 2014

Vote ouvert à tous les internautes sur le site où de nombreux lots sont à gagner: Une année de lecture en livres de poche et une invitation à la soirée de gala. 




vendredi 23 mai 2014

Un monde parfait


 Un écrivain londonien est invité dans un pays d'Europe centrale à occuper l'appartement d'Oskar, un ami parti régler son divorce. Mais la contrepartie va se révéler moins lisse et paisible que prévue. D'abord, il faut prendre soin des chats et surtout veiller à conserver au parquet sa brillance et son absence d'imperfection.



 Ce privilège conféré à l'écrivain s'accompagne d'une tutelle dont la première transgression entraîne le glissement vers une série de catastrophes. Le parquet, témoin du moindre écart commis par le résident temporaire, accuse son passage à chaque griffure et se transforme en territoire hostile.

 Comme dans le cabinet noir de Peter Straub, le roman de Will Wiles offre la perspective d'un monde ordonné et parfait qui coïncide avec la mort et réserve au chaos le seul espace de liberté.



Attention au parquet – Will Wiles – Traduit de l'anglais par Françoise Pertat – Liana Levi – 320 pages – 21€ - ***
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche – 18 mai 2014




jeudi 22 mai 2014

Les mots de la fin






 Un professeur est accusé d'avoir assassiné sa femme, déjà condamnée par la maladie de Charcot à une mort lente et dégradante. Elle a laissé sur la table de chevet un dernier message qui renforce encore l'obscurité de l'énigme. Désordre bohème du couple, infidélités réciproques, Thomas H. Cook interroge la vraisemblance des sentiments et la pertinence du réel face à la littérature.   





Le dernier message de Sandrine Madison – Thomas H. Cook – Traduit de l'américain par Philippe Loubat-Debranc – Seuil – 352 pages – 22€ - ***
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche – 18 mai 2014




mercredi 21 mai 2014

La loi du deal





 Qui du crime ou du monde des affaires singe l'autre? L'histoire des États-Unis éclaire cette porosité entre les deux. Quand une activité illégale (le commmerce de l'alcool pendant la Prohibition ou celui de la drogue dans les sociétés contemporaines) permet des profits monstrueux se pose très vite le problème de la reconversion des agents économiques. Rachid Santaki illustre avec la crudité du langage des cités, ce voyage entre deux mondes.   



Business dans la cité – Rachid Santaki – Seuil – 76 pages – 5,90€ - **
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche – 18 mai 2014




mardi 20 mai 2014

Bébés de labo





 Abandonnant Roy Grace, son personnage de flic de Brighton, Peter James s'aventure sur les territoires du thriller scientifique. Après avoir perdu un enfant victime d'une maladie rare, un couple accepte de servir de cobaye pour mettre au monde le bébé idéal. Les nazis avaient ouvert le chantier de la sélection génétique avec les Lebensborn, l'enfer est désormais tout proche. Terrible.




Des enfants trop parfaits – Peter James – Traduit de l'anglais par Raphaëlle Dedourge – Fleuve noir – 550 pages – 20€ - **
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche – 18 mai 2014




lundi 19 mai 2014

Les filles mortes se ramassent à la pelle



"L'égalité, c'est la trouvaille des riches pour contrôler les pauvres, et pour leur faire croire que le monde tend vers la justice alors qu'en réalité, il va dans la direction opposée."

 Bon, une fois qu'on a fait le tour de sa philosophie politique, on peut espérer que Mons Kallentoft a quelque chose de plus consistant à offrir à ses lecteurs. En tout cas, dès la première aventure de son héroïne, Malin Fors, ces derniers se sont précipités chez les libraires. Un "Hiver" glacial, un "Été" brûlant, la dépression d'"Automne" et l'apothéose du "Printemps" ont rythmé le flux et le reflux des violences spectaculaires. 




 Il fallait une "5ème Saison" à Malin, alcoolique, sombre, en colère contre le monde entier. Ce sera celle du silence dans lequel s'est enfermée une jeune victime qui avait ouvert le cycle en Hiver. Une saison froide pour une conclusion provisoire puisqu'un sixième épisode est déjà sorti au Seuil, "Les Anges aquatiques". Malin y affronte ses propres démons, l'alcool, le désamour et sa relation compliquée au bien et au mal. Peut-être que si McBain était né en 1968, il aurait imaginé cette tribu de flics dont le véritable héros est une femme.




La 5ème saison – Mons Kallentoft – Points Seuil – Traduit du suédois par Lucile Clauss et Emmanuel Curtil – 521 pages – 8€ -
Les anges aquatiques – Mons Kallentoft – Traduit du suédois par Frédéric Fourreau – Seuil 416 pages – 21,50€ -
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche - 18 mai 2014






vendredi 16 mai 2014

Le tour de la question





 Lucie, jeune journaliste pigiste, rêve de CDI et de tickets resto. "Je déteste ce que la dèche fait de moi", grince la travailleuse précaire condamnée à faire les poubelles de l'info. Ça tombe bien, dans celles de son immeuble on découvre le cadavre du bébé de la voisine. Certains voisins sont charmants, un peu trop peut-être. Pas de Pulitzer en vue pour ce cœur à prendre mais Elisa Vix mène très bien le bal des prétendants.




L'Hexamètre de Quintilien – Élisa Vix – Rouergue – 208 pages – 18€ - ***
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche – 11 mai 2014




jeudi 15 mai 2014

Prise de tête






 Publiée chez un éditeur qui s'est associé à VSD pour faire émerger de nouveaux talents, Dorothée Lizion a bénéficié du coup de cœur de Franck Thilliez. Les lecteurs amoureux de suspense où la science joue les trouble-fêtes ne manqueront pas de frissonner en découvrant cette jeune héroïne victime de migraines abominables et étrangement courtisée par la médecine et les services secrets.





Sous surveillance – Dorothée Lizion – Les Nouveaux Auteurs – 513 pages – 19,95€ - **
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche – 4 mai 2014




mercredi 14 mai 2014

Un monde meilleur






 A mi-chemin entre l'anticipation féroce et la prédiction sociologique, le roman de Cloé Mehdi surprend par l'originalité de son inspiration. Les détenus sont les nouveaux fauves à exhiber dans un univers carcéral recyclé en parc d'attraction. Un jeune criminel se retrouve en cavale avec une fillette. Leur hérédité est monstrueuse mais leur rédemption inscrite dans ce monde meilleur après lequel ils courent.





Monstres en cavale – Cloé Mehdi – Le Masque – 617 pages – 7,90€ - **
Lionel Germain - Sud-Ouest-dimanche – 4 mai 2014




mardi 13 mai 2014

Flemme fatale






 Doux rêveur, poète en quête d'ailleurs, Stéphane Néguirec est un jeune Breton égaré volontaire dans les moiteurs du Bénin où il se soumet à la sensualité indolente des danseuses de cabaret. Mais derrière la carte postale de Cotonou, s'élaborent des scénarios moins idylliques, conformes  à la violence politico-mafieuse qui gangrène l'Afrique de l'Ouest. Ponctué de proverbes savoureux, ce polar en explore les ombres. 




La traque de la musaraigne – Florent Couao-Zotti – Jigal – 216 pages – 17€ - **
Lionel Germain




lundi 12 mai 2014

Droit de suite






 La voix de Christian Bindner accompagne nos souvenirs des grands procès qui ont rythmé l'info sur France Inter. Il a troqué le micro contre la plume et nous propose quatre heures de la vie d'un homme dont le sort est suspendu à la décision d'un jury populaire aux Assises. Meurtrier du bourreau de son fils, le narrateur, lui-même dessinateur judiciaire, analyse avec passion les ambiguïtés de cette dramaturgie. 





La suite ne sera que silence – Christian Bindner – Le Passeur – 224 pages – 18,50€ - **
Lionel Germain – Sud-Ouest-dimanche – 4 mai 2014